Droit & Pratique professionnelle - Guide des techniques de plaidoirie - 2e - 24

GUIDE DES TECHNIQUES DE PLAIDOIRIE
Elle forme ainsi la science de l'ordonnancement du discours et de l'usage des ornements
utiles à toute démonstration. La rhétorique est réduite à la forme du discours.
De nombreux ouvrages, dont certains sont mentionnés dans la bibliographie, se limitent à
cette conception.
La rhétorique ne serait donc, en quelque sorte, que le style du discours, la manière de
formaliser et de présenter une thèse. On y perçoit la conception que l'on prête habituellement
aux sophistes qui enseignaient l'art de défendre toutes les thèses.
C'est en ces termes que Platon répond à Gorgias : « La rhétorique n'a aucun besoin de
savoir ce que sont les choses dont elle parle ; simplement, elle a découvert un stratagème
qui sert à convaincre, et le résultat est que, devant un public d'ignorants, elle a l'air d'en
savoir plus que n'en savent les connaisseurs. » (Platon, Gorgias).
Pour d'autres, tenants d'un sens substantiel - et donc plus large - la rhétorique est la
démarche intellectuelle qui vise également à contribuer à la recherche de la vérité. Plus
modestement, cette conception assigne à la rhétorique l'identification des arguments
propres à convaincre son auditoire et organiser ceux-ci.
Ainsi, par exemple, pour Cicéron, outre qu'elle leur apporte également la variété des
styles dont ils peuvent avoir besoin, la philosophie est nécessaire aux bons orateurs car
elle leur permet d'accéder aux vérités - au sens platonicien du terme - et, donc d'envisager
une plaidoirie plus pertinente17
.
Cicéron s'oppose ainsi aux rhéteurs qui n'enseigneraient que le style et qui feraient ignorance
de la recherche de la qualité des arguments eux-mêmes.
Àl'instar de Cicéron, Isocrate, fondateur d'une école de rhétorique célèbre, considérait que
l'art de bien parler passait nécessairement par l'art de bien penser18
.
Qui des tenants aminima et des défenseurs de la conception extensive a raison ?
Pour notre part, il n'y a aucun doute. Bien plaider ne peut se résumer à dire de fort belle
manière des âneries. Même bien formulées, des bêtises demeurent ce qu'elles sont.
Dans la suite de l'ouvrage nous retiendrons, donc, délibérément, une conception large de
la rhétorique en proposant une méthode non seulement pour « bien présenter ses arguments
et les moyens » (aspect formel de la plaidoirie), mais également, et préalablement,
une démarche intellectuelle pour tenter de faire émerger ceux-ci.
L'art oratoire limité à l'enseignement de l'attitude, du maintien et de la diction serait,
selon nous, insuffisant.
II. La culture générale au secours des avocats
Par ailleurs, il convient à l'avocat d'être suffisamment savant des choses pour ne pas se
trouver dépourvu dans un dossier.
17. Vauvenargues pour sa part considérait l'importance de deux études « l'éloquence et la vérité ; la vérité pour donner un
fondement solide à l'éloquence et bien disposer notre vie ; l'éloquence, pour diriger la conduite des autres hommes et défendre
la vérité » (Maximes et pensées).
18. Dans le même registre, Boileau conseillait pour sa part « Avant que d'écrire, apprenez à penser ».
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