Hors collection - Droit civil 1re année - 7e - 40

DROIT CIVIL
- le droit subjectif est le petit droit, toujours selon le doyen Carbonnier. On peut le
définir comme une « prérogative individuelle reconnue et sanctionnée par le Droit
objectif qui permet à son titulaire de faire, d'exiger ou d'interdire quelque chose
dans son propre intérêt ou, parfois, dans l'intérêt d'autrui » (G. Cornu, ibid.). L'accent
est alors mis sur la dimension individuelle de la norme juridique. Par exemple, le
droit de propriété, le droit au respect de la vie privée, le droit de vote, sont des droits
subjectifs. Le propre du droit subjectif est de conférer à son titulaire une exclusivité,
qui doit être respectée par les tiers. Je n'ai pas le droit d'aller chez mon voisin sans
son accord, de vendre les photos de son mariage, ou encore d'épier ses intentions
de vote dans l'isoloir (v. infra, sur la distinction, au sein des droits subjectifs, entre
les droits patrimoniaux et extrapatrimoniaux, n° 574 et s.).
Focus sur la distinction entre droit et liberté
C'est d'ailleurs dans la notion d'exclusivité que se situe sans doute la différence entre un droit
et une liberté. La liberté permet de faire quelque chose ou de ne pas faire quelque chose,
mais elle ne confère à son titulaire aucune exclusivité. Il en va ainsi, par exemple, de la liberté
d'aller et de venir, de la liberté de penser, d'expression, de se marier... Je peux aller où je veux,
mais je n'ai aucune exclusivité sur un objet précis. Cela explique, par exemple, que l'on peut
en principe céder ou concéder un droit subjectif (droit de propriété, droit à l'image, contrat
sur la vie privée...) sauf s'il est inaliénable (ex. droit de vote) mais pas une liberté, faute d'objet
à transmettre. La liberté est reconnue à tous dans les mêmes termes : nul besoin de la céder.
La distinction est essentiellement pédagogique, car nous verrons que les droits et les libertés
ont la même valeur. Le grand oral de l'examen d'avocat porte d'ailleurs globalement sur les
libertés et droits fondamentaux.
Pour autant, les notions de droit objectif et de droit subjectif ne s'opposent pas : il s'agit,
très souvent, d'analyser de deux manières différentes la même norme. Par exemple, nous
l'avons vu, l'article 1240 du Code civil constitue une règle de droit objectif, parce qu'elle
édicte une norme de conduite au sein de la société. Mais si l'on se place du point de vue
de la victime, la règle lui confère un droit subjectif : celui d'obtenir la réparation de son
dommage, sous la forme de dommages- intérêts. Nous verrons ainsi que la victime du
dommage dispose contre son auteur d'un droit de créance, qui constitue un droit subjectif.
41 Droits de l'homme - La notion de droit subjectif a donné lieu à des études savantes
pour en cerner les critères. On songe notamment à Ihering (1818-1892, juriste allemand),
qui le définit comme un intérêt juridiquement protégé, ou Jean Dabin (1889-1971, juriste
belge), qui l'envisage comme un lien d'appartenance- maîtrise. Certains auteurs, tels Léon
Duguit (1859-1928, juriste français de droit public), ont même nié la notion de droit subjectif,
beaucoup trop égoïste : il n'existerait que des situations juridiques reconnues par le droit
objectif. Cette affirmation a toutefois été démentie à l'époque moderne. En effet, les temps
sont à l'exaltation des droits de l'homme, qui sont des droits subjectifs dits fondamentaux,
dans la mesure où ils sont inhérents à la nature humaine et doivent, à ce titre, être respectés
par le législateur lui- même.
20

Hors collection - Droit civil 1re année - 7e

Table des matières de la publication Hors collection - Droit civil 1re année - 7e