Les grands concours - Questions de culture générale - 7e - 61

La France a- t-elle encore quelque chose à apporter au monde ?
49
grand- père [...] était toujours la même : " C'est une façon comme une autre de les mettre en
contact avec une œuvre fondamentale " . » Et la ministre espagnole de conclure : « L'Espagne est
ma patrie, par sentiment et responsabilité. [...] Mais je sais que j'appartiens à une communauté
universelle, comprenant tous ceux qui, à travers le monde et les temps contemporains, ont été
marqués par la France, de liberté et de raison, et qui ne sauraient exister ni se comprendre sans
elle. Cette communauté que le génie espagnol a su nommer : les " Afrancesados " . »
La France s'attire également la sympathie des minorités longtemps opprimées. Ainsi, les
communautés juives d'Europe sont longtemps reconnaissantes à la France, et singulièrement
à la République : celle- ci, en refusant toute discrimination fondée sur la religion ou l'origine, a
permis leur réintégration dans la vie civique. Avant la création de l'État d'Israël, elle peut faire
figure de nouvelle terre promise. On trouve une illustration dans le célèbre sermon d'Isaac
Lévy (1835-1912). Justifiant en 1872 sa décision de quitter l'Alsace annexée par la Prusse, le
grand- rabbin de Colmar commence par présenter les raisons en quelque sorte traditionnelles
de l'attachement à la France : « Mes frères, depuis ma jeunesse j'ai aimé notre patrie d'un amour
vif et ardent. Je l'aimais [...] non pas seulement parce que ses guerriers longtemps invincibles
[...] s'étaient acquis par leurs exploits une gloire immortelle que nos récents désastres [allusion
à la guerre franco- prussienne] n'ont pu effacer ni ternir ; je l'aimais non pas seulement parce
qu'elle était le temple des lettres et des beaux- arts, la régulatrice du goût, la dispensatrice de la
renommée [...] ; je l'aimais surtout parce qu'elle était grande par le cœur, parce qu'elle était
bonne et généreuse, parce qu'elle prenait en main la cause des faibles et des opprimés, parce
qu'elle était l'initiatrice du progrès, l'apôtre de la civilisation, parce que sur son sol germaient
les nobles idées de tolérance et de fraternité, pour se répandre de là sur l'univers entier. » Mais
il expose aussi des raisons propres à la communauté juive : « C'est la France qui, la première, a
réparé les iniquités dont Israël fut victime pendant des siècles ; c'est elle qui a convié nos ancêtres
au banquet de la vie sociale ; qui, la première, leur a permis de développer les facultés qu'ils
brûlaient de mettre au service du pays. » À la fin du siècle, l'affaire Dreyfus entame à peine cet
immense capital de sympathie : les juifs d'Europe préfèrent retenir le mouvement en faveur du
capitaine injustement condamné, puis sa réhabilitation finale ; au demeurant, rares étaient les
armées européennes dans lesquelles un soldat juif pouvait atteindre le grade d'officier.
Enfin, même si c'est sans doute de façon plus ambiguë, les peuples colonisés aussi ne sont
pas insensibles à la vocation émancipatrice de la France. En 1948, dans sa « Prière de paix » le
poète et homme d'État sénégalais Léopold Sédar Senghor (1906-2001) demande au « Seigneur,
parmi les nations blanches, [de] place[r] la France à la droite du Père. » Certes, il n'ignore pas
« qu'elle aussi est l'Europe » et qu'elle a commis les mêmes crimes que les autres pays colonisateurs.
Toutefois, il confesse « une grande faiblesse pour la France » : « Bénis ce peuple garrotté
qui par deux fois sut libérer ses mains et osa proclamer l'avènement des pauvres à la royauté
Qui fit des esclaves du jour des hommes libres, égaux, fraternels. »
Si elle s'est constitué un vaste empire outre- mer, la France a en effet aboli par deux fois
l'esclavage, en 1794 et 1848. Surtout, elle a proclamé des droits qui, par leur dynamique propre,
ont fini par s'appliquer également aux peuples colonisés.
Transition : Très consciente de la sympathie qu'elle suscitait chez les peuples - une sorte de
soft power avant l'heure, pour reprendre l'expression forgée à la fin du xxe
siècle par l'américain
Joseph Nye (né en 1937) -, la France a été pionnière en matière de diplomatie culturelle : elle
Les grands concours - Questions de culture générale - 7e

Table des matières de la publication Les grands concours - Questions de culture générale - 7e
