Droit & Pratique professionnelle - Les sociétés civiles immobilières - 3e - 256

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tiers, il est nécessaire que cet acte non seulement entre
directement ou indirectement dans l'objet social (section
1), mais aussi qu'il ne soit pas contraire à l'intérêt
social de la société (section 2). Depuis quelques années,
la manière dont la jurisprudence entend la conformité à
l'intérêt social s'est également fixée. C'est en fonction
de l'ampleur de la garantie que l'intérêt est apprécié.
Ces décisions doivent conduire les parties intéressées
à la plus grande prudence dans la conclusion de ces
sûretés par une SCI.
747. Sanction (objet social et/ou intérêt social). - Il
convient de prêter une grande attention aux solutions
dégagées en ce domaine, car la sanction est lourde.
En effet, la Cour de cassation a précisé que l'action
en nullité d'une sûreté accordée par une société civile
immobilière en garantie de la dette d'un associé vise à
faire constater une nullité absolue3
. Depuis 2008, cette
qualification a naturellement moins d'intérêt dans la
mesure où l'on a procédé à un alignement des intérêts
entre nullité relative et nullité absolue4
. Néanmoins,
cela signifie que l'action est ouverte à toute personne
susceptible de démontrer un intérêt, ce qui accentue
les risques pesant sur la validité de la sûreté, et ne
peut manquer de susciter l'impression d'une certaine
« prime à la mauvaise foi » quand c'est la SCI elle-même
qui sollicite une telle nullité.
748. Extension de la solution hors du domaine des
sûretés. - Cette solution, consistant à conditionner la
validité de la sûreté au respect de l'intérêt social, avait
été largement discutée en doctrine et par la pratique.
L'absence d'enthousiasme que l'on a toujours remarqué
n'a pas empêché la Cour de cassation de faire déborder
la règle érigée hors du traditionnel domaine des sûretés
en employant, dans un arrêt du 11 janvier 2023, une
formulation particulièrement large5
. Dans cette espèce, il
s'agissait d'un contrat de prêt et non plus d'une sûreté.
3. N. rontchevSky, « Observations sur la nullité du contrat contraire à l'intérêt
social », Liber amicorum. Mélanges en l'honneur de Jean-Patrice et Michel
Storck, Dalloz-Joly, 2021, p. 617, spéc. no
12.
4. Cass. 1re
civ., 18 oct. 2017, n° 16-17184 ; RD bancaire et fin. 2017,
comm. 243, obs. D. LegeaiS ; JCP G 2017, doctr. 1269, n° 5, obs.
Y.-M. Serinet ; LEDB, déc. 2017, n° 11, p. 5, obs. M. Mignot ; Banque et
droit, 2017, n° 176, p. 62, obs. N. rontchevSky ; JCP N 2018, 1118, obs.
Th. De raveL D'eScLapon.
5. Cass. 3e civ., 11 janv. 2023, no 21-22174 ; arrêt préc., V. supra, no
256
710.
Section 1 * La constitution de la sûreté
doit entrer directement ou indirectement
dans l'objet social
749. Présentation. - Dans un arrêt de principe du
8 novembre 2007, la première chambre civile de la Cour
de cassation a précisé que « le cautionnement donné par
une société n'est valable que s'il entre directement dans
son objet social ou s'il existe une communauté d'intérêts
Quand bien même ce prêt était garanti par une sûreté
hypothécaire, c'est bien de sa validité dont il était ici
question. La solution est étonnante, parce qu'elle est
générale dans sa formulation et, en conséquence, son
champ d'application (tous les actes sont visés), mais
également parce qu'elle est claire. Le libellé est le suivant
: « Les actes accomplis par le gérant ne peuvent
engager la société si, étant de nature à compromettre
son existence même, ils sont contraires à l'intérêt social,
y compris lorsqu'ils entrent dans son objet statutaire ».
Selon la Cour de cassation, en principe, l'engagement
souscrit par le gérant d'une société civile est soumis au
respect de l'intérêt social, même si l'acte entre dans
l'objet statutaire de la société. À défaut, il ne saurait
engager la société. Ainsi trouve-t-on la même grille de
lecture qu'en matière de sûreté. L'on peut bien sûr rester
perplexe face à une telle généralisation. Les mêmes
critiques développées lorsque la jurisprudence s'est
diffusée dans le domaine des sûretés valent ici. Elles
sont sans doute exacerbées par l'extrême généralité du
champ d'application. L'intérêt social est une notion difficile
à définir, qui laisse une très (trop ?) grande latitude à
l'interprétation et, partant, suscite une grande insécurité
juridique. Le critère retenu, celui de savoir du montant de
l'opération et de la pérennité de la société, peut aboutir
à une certaine frilosité préjudiciable à la vie des affaires.
En pratique, en attendant de savoir si la jurisprudence
va continuer d'emprunter ce chemin qui peut très largement
être discuté, mieux vaut prendre toutes précautions
nécessaires dans l'acte, dès lors qu'une éventuelle
contrariété peut être décelée, notamment en fournissant
et en indiquant toutes les explications utiles susceptibles
de justifier l'acte. Par exemple, la démonstration d'une
contrepartie, comme en matière de sûreté, pourrait permettre
d'éviter certaines difficultés.
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