Droit & Pratique professionnelle - Les sociétés civiles immobilières - 3e - 262

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sa mise en œuvre compromettrait l'existence même
de la société. En effet, même si le cautionnement est
consenti sur l'actif unique de la SCI et que sa mise
en jeu revient, le cas échéant, à compromettre très
gravement son existence, ce cautionnement peut
néanmoins être considéré comme valable, et donc
conforme à l'intérêt social, dès lors qu'il trouve une
contrepartie. En d'autres termes, l'avantage que retire
la société de l'affectation de son bien à la garantie
de la dette d'autrui peut justifier le cautionnement de
telle sorte qu'il n'est plus contraire à l'intérêt social.
Par exemple, la Cour de cassation a validé le cautionnement
dans l'hypothèse suivante. La banque avait
prêté des fonds à l'un de ses clients lui-même associé
majoritaire et gérant d'une SCI. Or le prêt avait pour
objet de lui fournir la somme pour libérer l'apport en
numéraire qu'il avait souscrit auprès de la SCI. Cette
libération allait nécessairement se traduire par un flux
financier au profit de la SCI, ce qui allait lui permettre
d'acquérir deux biens immobiliers de même montant.
Des revenus fonciers étaient ainsi procurés. Dès lors, le
cautionnement hypothécaire portant sur les deux biens
était valable étant donné que, sans sa souscription,
elle n'aurait pu acquérir d'immeubles. La conformité à
l'intérêt social était caractérisée38
.
766. Précautions à prendre. - Au regard de cette
jurisprudence, dont les deux composantes (ampleur de la
garantie et existence éventuelle d'une contrepartie) sont
exposées dans un arrêt du 14 février 201839
, et qui est
désormais bien établie et harmonisée entre les diverses
formations de la Cour de cassation, des précautions
s'imposent pour prévenir la survenance de contestations
portant sur la validité de sûretés consenties par la SCI
en garantie d'engagements d'associés ou de sociétés
38. Cass. com., 2 nov. 2016, n° 16-10363 ; Dr. sociétés, 2017, comm. 3,
obs. H. hovaSSe ; JCP N 2017, 1107, obs. Th. De raveL D'eScLapon ;
v. égal. Cass. com., 10 févr. 2015, n° 14-11760 ; Dr. sociétés 2017,
comm. 87, obs. H. hovaSSe ; Dr. sociétés 2015, comm. 147, obs.
M. rouSSiLLe ; Gaz. Pal., 11-13 oct. 2015, n° 286, obs. C. berLauD ;
BJS 2015, p. 234, note F. DanoS, D. 2015, p. 2401, obs. J.-C. haLLouin
(en l'espèce, le cautionnement permettait l'organisation du groupe et
assurait la bonne fin de la procédure de sauvegarde).
39. Cass. com., 14 févr. 2018, n° 16-19762, JCP N 2018, 1278, n° 4, obs.
Ph. SiMLer ; Dr. sociétés 2018, comm. 81, note H. hovaSSe ; LEDB,
3 avr. 2018, n° 4, p. 6, obs. S. piéDeLièvre ; JCP N 2018, 1298, obs.
Th. De raveL D'eScLapon.
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du même groupe40
. Dans la mesure du possible, il est
important de pouvoir justifier de l'intérêt de la société à
souscrire le cautionnement, notamment en raison de la
contrepartie attendue par la SCI au plan économique ou
patrimonial : le gérant pourrait par exemple préciser, soit
dans un exposé préalable qui figurerait dans la décision
collective des associés, soit, en l'absence de décision
collective des associés, en préambule de l'acte de garantie41
,
les motifs ayant conduit les associés ou le gérant
à faire souscrire cet engagement par la société, notamment
lorsque l'opération grève lourdement le patrimoine
de la société garante. Une telle justification semble vaine
lorsque la garantie, constituée sur le seul immeuble de
la SCI, met en jeu l'existence même de la SCI sans que
celle-ci ne tire profit d'un tel engagement ; si une sûreté
est néanmoins consentie en cette situation, le rédacteur
de l'acte doit, en l'état actuel de la jurisprudence, informer
le créancier des incertitudes entourant aujourd'hui
la constitution d'une telle garantie. Par ailleurs, une utilisation
du crédit de la SCI au bénéfice des dirigeants
ou d'associés ou d'autres personnes morales dans lesquelles
les associés ont des intérêts risque non seulement
d'être annulée pour non-conformité à l'objet social et à
l'intérêt social, mais pourrait aussi être qualifiée pénalement
d'abus des biens ou du crédit de la société42
.
767. Résumé des solutions. - Les solutions, en
matière d'affectation hypothécaire d'un immeuble, par
une SCI, pour la garantie de la dette d'autrui, ne sont
pas simples. Pour systématiser les choses, il convient
de répondre à une série de questions.
La sûreté est-elle conforme à l'objet social ? Elle peut
l'être de trois façons alternatives :
* la faculté de cautionner est prévue dans les statuts ;
* le cautionnement est consenti par l'unanimité des
associés et exprimé dans un même acte ;
40. P.-M. reverDy, « Le cauchemar de l'intérêt social des SCI », Defrénois,
11 mars 2021, no
169u4, p. 19.
41. P. Marcou, « La place du préambule contractuel », JCP N, 2023, 1129,
spéc. no
12.
42. V. M. Dagot et C. MouLy,
et son abus », Rev. sociétés 1988, p. 1 ; Cass. 1re
« L'usage personnel du crédit social
civ., 29 févr.
2000, n° 97-18734, JurisData n° 2000-000775 ; Bull. civ. I, n° 72 ;
JCP G 2000, IV, 1678, qui évoque la qualification d'abus de biens
sociaux ou de crédit social.
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