Droit & Pratique professionnelle - Les sociétés civiles immobilières - 3e - 289

L'EXPRESSION DU VOTE DES ASSOCIÉS
délibération sociale pour la désignation du représentant36
.
À défaut d'accord entre indivisaires sur la désignation
d'un représentant, le législateur prévoit que le
mandataire sera désigné en justice à la demande du
plus diligent.
837. Indivision :
dispositions statutaires. -
Conformément à la liberté statutaire prévue à l'article
1844 alinéa 4 du Code civil, les statuts de la SCI
peuvent prévoir que le représentant de l'indivision doit
être choisi parmi les indivisaires ou parmi les autres
associés ; il peut également être précisé qu'en cas de
désaccord des indivisaires, un mandataire sera désigné
en justice à la demande du plus diligent ou de la société
elle-même37
. Une clause statutaire ne peut en revanche
fixer les conditions de majorité visant la désignation du
représentant : ces conditions découlent non pas de
l'article 1844, mais du droit de l'indivision : la majorité
requise est des deux tiers des droits indivis pour désigner
un mandataire procédant au vote relevant des actes
d'administration et l'unanimité si le vote relève d'un acte
de disposition.
Par ailleurs, une clause statutaire ne peut déroger aux
dispositions impératives de ce texte prévoyant en cas de
désaccord entre les copropriétaires de parts indivises la
désignation du mandataire en justice38
.
838. Démembrement de propriété. - On renverra ici
aux développements déjà consacrés à cette question39
.
Rappelons toutefois qu'en matière de démembrement
de propriété, l'article 1844 alinéa 3 du Code civil fixe
un principe, dont la compréhension a fait couler beaucoup
d'encre en droit des sociétés, suscitant ainsi
36. Cass. 3e
civ., 21 déc. 2017, n° 15-25627, P+B+I, JurisData
n° 2017-026658 ; JCP E 2018, 1077, note C. bariLLon ; JCP G 2018,
115, note J. kLein ; Dr. sociétés 2018, comm. 43, obs. H. hovaSSe ; BJS
2018, p. 74, note J.-F. barbièri ; D. 2018, p. 147, note A. couret ; JCP G
doctr. 656, note F. DeboiSSy et G. wicker ; JCP N n° 40, oct. 2018, 1302,
note M. Storck.
37. E. nauDin, « La représentation des indivisaires dans l'exercice du droit de
participer aux décisions collectives », BJS, févr. 2012, p. 178.
38. Cass. 1re
civ., 15 déc. 2010, n° 09-10140, F. c/O., JurisData
n° 2010-023825 ; Bull. civ. I, n° 268 ; JCP E 2011, 1072, note H. hovaSSe ;
JCP E 2011, 1826, chron. F. DeboiSSy et G. wicker ; BJS 2011, p. 373,
note F.-X. LucaS ; D. 2011, p. 73, obs. A. LienharD ; Dr. sociétés 2011,
comm. 45, note M.-L. coqueLet ; Dr. sociétés 2011, comm. 48, note
H. hovaSSe ; Rev. sociétés 2011, p. 280, note L. goDon.
39. V. supra, n° 471 et s.
40. Cass. 3e
civ., 2 mars 1994, n° 91-21696, Rev. sociétés 1995, p. 41,
note P. DiDier.
41. Cass. com., 22 févr. 2005, n° 03-17421, D. 2005, Pan. 1430, obs.
F. ThuLLier ; D. 2005, p. 2952, obs. J.-C. HaLLouin et E. LaMazeroLLeS ;
Rev. sociétés 2005, p. 353, note P. Le cannu ; Dr. et patr., mai 2005,
p. 102, obs. D. Poracchia.
289
une profonde réflexion doctrinale. C'est ainsi que ladite
disposition énonce que « si une part est grevée d'un
usufruit, le droit de vote appartient au nu-propriétaire,
sauf pour les décisions concernant l'affectation des
bénéfices, où il est réservé à l'usufruitier ». Ainsi, une distinction
est faite entre les décisions concernant l'affectation
des bénéfices, pour lesquelles le vote sera réservé à
l'usufruitier et les autres, pour lesquels le vote appartiendra
au nu-propriétaire. Le principe est cependant très
fortement relativisé par le dernier alinéa de l'article 1844
du Code civil qui prévoit que « les statuts peuvent déroger
aux dispositions des deux alinéas qui précèdent »,
c'est-à-dire, notamment, l'alinéa concernant les principes
fixés en matière de répartition du droit de vote
entre usufruitier et nu-propriétaire. Il est donc possible
de prévoir des dérogations statutaires au principe fixé
et précédemment énoncé. Ainsi, les statuts peuvent
attribuer le droit de vote à la fois au nu-propriétaire et à
l'usufruitier40
. Dans quelles limites ces dérogations statutaires
peuvent-elles être accordées ? C'est tout l'enjeu
des débats doctrinaux et des nombreuses décisions
rendues à ce propos. Une première limite est posée
par un arrêt du 22 février 2005, lequel prévoit que « les
statuts peuvent déroger à la règle selon laquelle si une
part est grevée d'un usufruit, le droit de vote appartient
au nu-propriétaire, à condition qu'il ne soit pas dérogé
au droit du nu-propriétaire de participer aux décisions
collectives »41
. Autrement formulé, on peut déroger à ce
principe attribuant le droit de vote au nu-propriétaire en
l'attribuant, en sa totalité, à l'usufruitier. En revanche,
ceci doit se faire sous la réserve de ne pas empêcher le
nu-propriétaire de participer aux décisions collectives.
En d'autres termes, il faudra qu'il puisse s'exprimer, participer
aux débats, voire émettre son avis. En somme,
son droit de vote peut lui être supprimé, pas son droit
de participer aux décisions collectives. Dès lors, il est
impératif de convoquer le nu-propriétaire et d'organiser
concrètement son droit de participation, par exemple
en lui permettant de formuler des observations. Cette
Droit & Pratique professionnelle - Les sociétés civiles immobilières - 3e

Table des matières de la publication Droit & Pratique professionnelle - Les sociétés civiles immobilières - 3e
