Droit & Pratique professionnelle - Droit du marché numérique - 2e - 424

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Aussi une demande visant à la rectification des données
et à la suppression des contenus mis en ligne sur un
site internet est « une et indivisible » et ne peut être
portée que devant le juge compétent pour connaître de
l'intégralité d'une demande de réparation du dommage.
876. Jurisprudence française. - La Cour de cassation
a fait application de cette jurisprudence dans une
affaire portant sur des actes de concurrence déloyale. En
l'espèce, une société tchèque de production et de diffusion
de contenus pour adultes reprochait à un producteur
hongrois d'avoir tenu des propos dénigrants sur son site
internet hébergé en Hongrie où il exerce son activité et où
il est domicilié. Les contenus litigieux étant accessibles
notamment en France, la société avait saisi le président
du tribunal de grande instance de Lyon pour faire cesser
le trouble. Rappelant la jurisprudence européenne
de 2017, la Cour de cassation sur la demande de retrait
confirme l'incompétence des juridictions françaises et
juge que seules les juridictions tchèques sont « compétentes
pour connaître de l'intégralité d'une demande
de réparation du dommage en vertu de la jurisprudence
résultant des arrêts précités Shevill et eDate Advertising »
et que les juridictions hongroises où le défendeur est
domicilié ne sont compétentes que « pour ordonner
le retrait des commentaires prétendument dénigrants
imputés à M. K. et leur rectification par publication d'un
communiqué »43
. Sur la demande de réparation des actes
commis sur le territoire français, la CJUE est saisie d'une
question préjudicielle visant à savoir si l'action peut être
portée devant le juge de chaque État membre sur le territoire
duquel un contenu est mis en ligne ou accessible,
« dès lors que l'intérêt d'une bonne administration de
la justice pourrait justifier que la juridiction compétente
pour connaître de la demande tendant à la rectification de
données et à la suppression de commentaires ait compétence
exclusive pour connaître de la demande tendant
à l'allocation de dommages-intérêts ». On appréciera la
tentative de la première chambre civile de limiter le forum
shopping des justiciables...
Au sein des juridictions nationales le choix s'avère également
délicat. Dans un litige entre une association de
43. Cass. 1re
civ., 13 mai 2020, n° 18-24850, Contrats, conc. consom. 2020,
comm. n° 137, obs. M. MaLaurie-VignaL.
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chauffeurs de taxi FFTP et Uber, la Cour de cassation a
apporté une précision sur la juridiction compétente. Elle
rappelle que le lieu où le fait dommageable s'est produit
s'entend, selon la jurisprudence de la Cour de justice de
l'Union européenne, à la fois du lieu où le dommage est
survenu et de celui de l'événement causal. Si ces lieux
ne sont pas identiques, le défendeur peut être attrait
devant le tribunal de l'un d'eux44
.
Les chauffeurs soutenaient que les pratiques reprochées
aux sociétés Uber constituaient des actes de concurrence
déloyale mais aussi des pratiques restrictives de
concurrence relevant de la matière délictuelle avaient été
commises notamment dans le ressort du tribunal judiciaire
de Paris et produisaient un constat établi à Paris.
Dès lors la chambre commerciale décide que « l'événement
causal était au moins partiellement localisé dans
le ressort du tribunal judiciaire de Paris... sans avoir à
caractériser le lieu de matérialisation du dommage. »45
877. Libre prestation de services et restrictions
nationales46
. - La Cour de justice dans un arrêt récent
Airbnb a retenu une approche large de la notion de
services de la société de l'information et, a contrario,
une approche restrictive de l'activité immobilière. Les
plaignants avaient soulevé que les services complémentaires
(indications sur le prix demandé) offerts par la
plateforme d'intermédiation conféraient à son activité
une intervention dans la contractualisation de services
immobiliers et de ce fait pouvaient être soumis à la réglementation
nationale sur les agents immobiliers. Ils espéraient
pouvoir bénéficier de la solution retenue à propos
des services de véhicules de transport de passagers47
.
Dans ce domaine, la Cour avait en effet jugé qu'Uber
exerçait une influence décisive sur les conditions de la
prestation de transport des chauffeurs non professionnels
faisant usage de l'application mise à leur disposition
par cette société48
.
44. CJCE, 30 nov. 1976, Mines de potasse d'Alsace SA, C-21/76
45. Cass. com., 28 juin 2023, n° 21-24883.
46. V. aussi supra, n° 18 et s.
47. F. ChaLtieL, « La plate-forme Airbnb devant la Cour de justice de l'Union
européenne : l'instrument prend le pas sur la matière », LPA 7 août
2020, n° 1520, p. 8.
48. CJUE, 10 avr. 2018, n° C320/16, Uber France, pt. 21.
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