Droit & Pratique professionnelle - Droit et pratique de la lutte contre la criminalité organisée - 1re - 123

LES MOYENS JURIDIQUES DE LUTTE CONTRE LA CRIMINALITÉ ORGANISÉE
à elle, à vérifier que la libre disposition ou la propriété
économique réelle est motivée par des
éléments factuels.
B. La confiscation de bien appartenant
à des tiers de mauvaise foi
ou la caractérisation de l'absence
de bonne foi
380. Démonstration de la mauvaise foi ou de l'absence
de bonne foi du tiers. - Pour rappel, l'article 13121
du Code pénal prévoit, à l'exception de la peine de
confiscation portant sur le produit de l'infraction, que
« la confiscation porte sur tous les biens [...] dont le
condamné est propriétaire, ou, sous réserve du droit de
propriété du tiers de bonne foi, dont il a la libre disposition
». Par conséquent, la simple démonstration de la
libre disposition du bien par la personne condamnée ne
suffit pas, il revient à la juridiction de jugement de démontrer
également la mauvaise foi du tiers ou son absence
de bonne foi. Démontrer la mauvaise foi du tiers ou son
absence de bonne foi est un élément essentiel, puisque
sa non-caractérisation fait obstacle au prononcé de la
peine de confiscation, et ce, quel que soit le fondement.
AVERTISSEMENT
Pour rappel, pour prononcer la peine de confiscation du produit
direct ou indirect de l'infraction, il n'y a pas de besoin de démontrer
la libre disposition du bien, puisque le bien est le fruit de l'infraction
et, à ce titre, il peut être confisqué en quelque main qu'il se trouve,
à l'exception des droits des tiers de bonne foi qui font obstacle à
la confiscation64
.
EN PRATIQUE
Pour caractériser la mauvaise foi ou l'absence de bonne
foi, la chambre criminelle de la Cour de cassation renvoie
à l'état de fait « que [le tiers] ne pouvait ignorer les faits
commis par le condamné »65
. Concrètement, il doit être
démontré par des éléments factuels que le tiers propriétaire
avait connaissance ou aurait dû savoir que le bien
qu'il a acquis ou dont la propriété lui a été transférée
64. Cass. crim., 7 nov. 2018, n° 17-87484.
65. Cass. crim., 25 nov. 2020, n° 19-86979.
Il est important de souligner que la Cour de
cassation se borne à vérifier si la mauvaise foi
ou l'absence de bonne foi a été motivée. En
revanche, les arguments sur lesquels la juridiction
de jugement fonde sa décision relèvent de
l'appréciation souveraine des juges du fond.
66. Cass. crim., 31 mai 2017, n° 16-86872.
67. Cass. crim., 28 juin 2023, n° 22-85091.
68. Cass. crim., 28 juin 2023, n° 21-87417.
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était l'instrument de l'infraction. La Cour de cassation a
rendu en la matière plusieurs arrêts où elle a ainsi jugé
que « le démembrement de propriété d'un bien immeuble,
par l'effet d'une donation-partage, qui, au regard des
conditions de sa réalisation et de ses modalités, n'a pas
privé, effectivement, des attributs inhérents aux droits
du propriétaire les personnes mises en examen pour des
faits de blanchiment de fraude fiscale pour lesquels elles
encouraient, à la date des faits reprochés, la peine complémentaire
de confiscation de tout ou partie de leur patrimoine,
ne constitue pas un obstacle à la saisie pénale
dudit bien »66
. Ce raisonnement peut être dupliqué pour
le transfert de tout autre type de biens à partir de l'instant
où il existe un ensemble d'éléments factuels permettant
de justifier l'hypothèse d'un transfert en vue de soustraire
le bien à la mesure de saisie ou de confiscation. Pour
la chambre criminelle, la mauvaise foi ou l'absence de
bonne foi du tiers peut également se caractériser par
le simple fait que le tiers savait que le prévenu avait la
propriété économique réelle des biens confisqués67
. Sur
un plan pratique, les éléments ayant servi à démontrer
la libre disposition du bien peuvent également servir à
démontrer dans un second temps, l'absence de bonne
foi du tiers ayant des droits sur le bien. Peuvent également
servir à la démonstration de la mauvaise foi ou de
l'absence de bonne foi, les conditions de transfert des
droits de propriété telles que les conditions financières,
les personnes à qui la propriété a été transférée ou encore
de déterminer quels sont les attributs aux droits de propriété
conservés par la personne suspectée ou mise en
cause. Enfin, la mauvaise foi ou l'absence de bonne foi
s'apprécie au moment de la saisie68
.
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