Droit & Pratique professionnelle - Droit et pratique de la lutte contre la criminalité organisée - 1re - 201

LES SPÉCIFICITÉS DU CONTENTIEUX DE LA CRIMINALITÉ ORGANISÉE
juridique. Il faut également citer les articles fondant cette
qualification juridique, produire leur copie en annexe et
veiller à faire traduire le texte de la CRI ainsi que ses
annexes et ce même si le texte international applicable
ne le prévoit pas. Il en va de la célérité avec laquelle les
investigations pourraient être menées. À la différence
de ce qui vaut pour la DEE, certains États, saisis d'une
CRI peuvent exiger le respect de la double incrimination
avant de procéder aux actes sollicités, d'où l'importance
d'annexer à la CRI les textes applicables et
leur traduction.
601. Transmission de la CRI. - Il s'agit d'une
question généralement réglée par la convention internationale
applicable. Plus exactement, l'article 694 du
Code de procédure pénale indique qu'en l'absence de
Convention internationale en stipulant autrement, les
demandes d'entraide émanant des autorités judiciaires
françaises et destinées aux autorités judiciaires étrangères
sont transmises par l'intermédiaire du ministère de
la Justice. Les pièces d'exécution sont renvoyées aux
autorités de l'État requérant par la même voie.
602. Articulation de la DEE ou de la CRI avec l'exploitation
de données recueillies en temps réel. - Il
faut être attentif au fait que les enquêteurs qui exploitent
la géolocalisation d'un objet tel un véhicule ou un téléphone
ne peuvent régulièrement acter sur procès- verbal
le fait que le véhicule ou l'objet géo localisé a été localisé
sur le territoire d'un État étranger sans avoir obtenu
l'autorisation de le faire de la part de cet État. Hors
toute DEE (ou CRI) ayant obtenu en retour d'exécution
l'autorisation de la part de l'État concerné de recueillir
les données de géolocalisation du véhicule ou du téléphone
concerné, une telle mention serait irrégulière.
Dans le cas où des déplacements sur le territoire d'un
État étranger, en lien avec les faits poursuivis sont subodorés,
il faut donc adresser préalablement une DEE ou
une CRI à l'État concerné, expliquant la nécessité pour
l'instruction de connaître la matérialité et l'exactitude
des déplacements en cause. L'acte adressé à l'État
étranger doit indiquer l'immatriculation du véhicule, le
n° de la ligne téléphonique concernés, les propriétaires
et les utilisateurs des objets géolocalisés ainsi que la
période de temps pour laquelle on souhaite recueillir
en procédure les données de géolocalisation situées
sur un territoire étranger. Il a été jugé que les données
issues d'une géolocalisation mise en œuvre sur le territoire
national et s'étant poursuivie sur le territoire d'un
autre État ne pouvaient, lorsque cette mesure n'avait
pas fait l'objet d'une acceptation préalable ou concomitante
de celui-ci au titre de l'entraide pénale, être
exploitées en procédure qu'avec son autorisation23
.
Toutefois, les enquêteurs pourront régulièrement mentionner
sur leurs procès- verbaux, ensuite de l'analyse
des points de géolocalisation recueillis sur le territoire
national, que les objets géolocalisés se sont dirigés vers
le territoire d'un État frontalier. Par conséquent, les données
issues d'une géolocalisation mise en œuvre sur
le territoire national mentionnant des heures de franchissement
d'une frontière ou mentionnant simplement
un déplacement géolocalisé vers le territoire de tel État
ne consistent pas en l'exploitation de données de géolocalisation
situées sur le territoire d'un État étranger
et n'encourent, à ce titre, aucun grief lié à l'absence
d'autorisation des pays concernés24
tacle légal non plus selon nous25
. Il n'y a pas d'obsà
ce que le magistrat
instructeur sollicite de l'État étranger le droit de pouvoir
exploiter en procédure les points de géolocalisation d'un
objet concernant des voyages déjà effectués. Mais là
encore, ce n'est qu'après avoir recueilli, en exécution
d'une DEE ou d'une CRI émise par le magistrat instructeur,
l'accord formel de l'État étranger sur ce point,
pour un objet déterminé (voiture, téléphone...) et une
période de temps limitée (précisée dans la demande de
coopération), que les enquêteurs pourront régulièrement
exploiter les données de géolocalisation en procédure.
603. Coopération internationale avec les Émirats
arabes unis. - Depuis plusieurs années les investigations
menées ont montré qu'un certain nombre de personnes
appartenant au crime organisé avaient pu élire
résidence, gérer leurs avoirs et organiser la poursuite de
23. Cass. crim., 9 févr. 2016, no
24. Cass. crim., 2 mars 2021, no
15-85070.
20-84004.
25. La décision du 9 février 2016, §12, indique notamment « qu'à défaut de
constatation par [la chambre de l'instruction] d'une autorisation préalable
ou concomitante de l'État étranger concerné par l'opération critiquée,
dans le cadre de l'entraide pénale, il lui appartenait de rechercher, au
besoin en procédant à un supplément d'information, si les autorités
compétentes de cet État autorisaient l'exploitation des données en
résultant [...] ».
201
Droit & Pratique professionnelle - Droit et pratique de la lutte contre la criminalité organisée - 1re

Table des matières de la publication Droit & Pratique professionnelle - Droit et pratique de la lutte contre la criminalité organisée - 1re
