Droit & Pratique professionnelle - Droit et pratique de la lutte contre la criminalité organisée - 1re - 220

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personne en vient ou s'y trouve et organise ses activités
illicites à distance, soit qu'elle en est originaire et a
gardé des liens utiles et des moyens de repli (certains
pays du Maghreb, pour les importations de cannabis ;
le Bangladesh, la zone indienne ou la Chine pour la
délinquance de blanchiment d'argent), soit, enfin, que
certains pays, par leur législation ou leurs pratiques en
matière de coopération judiciaire internationale, mais
aussi par leur cadre de vie et législation interne permettant
de dépenser les produits du crime sans trop
de difficulté et sans besoin de montage complexe de
blanchiment, attirent la haute délinquance, cette donnée
étant fluctuante (exemple de Dubaï actuellement65
). Dès
lors, le critère de l'article 144 précité tenant à l'absence
de garantie sérieuse de représentation est très souvent
retenu pour justifier la détention provisoire.
C. La multiplicité des personnes mises
en examen, facteur d'allongement
de la détention provisoire
651. L'absence de loups solitaires : une criminalité
nécessairement collective. - C'est la nature même
de cette délinquance que d'engendrer l'action collective,
même si, comme dans tous les groupes humains,
des personnalités ressortent et deviennent des leaders
(« le boss », « le parrain », « le Vor ») et une hiérarchie
apparaît.
Ainsi, il n'est pas de dossiers d'importation de stupéfiants
sans au moins quatre ou six mises en examen, le
plus souvent bien plus.
652. La multiplicité des mises en examen, facteur
général d'alourdissement des dossiers de criminalité
organisée. - Le juge d'instruction et le juge des
libertés et de la détention doivent consacrer un temps
très important de leur activité à gérer la détention de
chaque mis en examen, ce qui empiète beaucoup, pour
le premier, sur le temps qu'il doit consacrer aux investigations
qu'il doit mener. Incidemment, les sections des
chambres de l'instruction spécialisées en criminalité
65. En décembre 2023, le ministère de la Justice a créé un poste de magistrat
de liaison à Dubaï, dans l'objectif de faciliter les extraditions de
personnes recherchées par les autorités judiciaires françaises et relevant
de la criminalité organisée (les profils concernés étant ceux de trafiquants
internationaux en matière de stupéfiants).
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organisée lorsqu'elles existent (cours d'appel de Paris,
d'Aix-en-Provence, etc.) sont souvent repérées comme
étant « les chambres de la détention ». Mais, au-delà de
cet aspect chronophage de la gestion de la détention
provisoire qui est démultiplié en matière de criminalité
organisée66
, il faut avoir à l'esprit que la détention d'un
mis en examen peut devenir tributaire de la situation
d'un autre mis en examen. Ainsi, il faudra soit attendre
que d'autres mis en examen, et parfois tous soient
interrogés par le juge d'instruction, avant d'entendre le
protagoniste qui s'impatiente en détention faisant valoir
que son rôle est moindre ou qu'il n'est pas concerné par
plusieurs pans du dossier.
653. Effets croisés de la multiplicité des mises
en examen sur la détention : le cas des requêtes en
annulation ou des demandes d'actes. - Une situation
similaire se pose lorsque certains mis en examen
déposent des requêtes en annulation, pouvant être à
l'origine d'une « glaciation » partielle ou totale des investigations
pour plusieurs mois, tenant notamment à une
prise de position consistant, pour la défense de ces
mis en examen, à refuser tous nouveaux interrogatoires
ou opposant le droit au silence tant que leur demande
d'annulation n'est pas tranchée67
.
Pour autant, les critères de l'article 144 précité ayant
justifié le placement et le maintien en détention d'une
personne demeurent valables que celle-ci soit à l'origine
de la requête en annulation ou qu'elle soit un tiers mis
en examen. Ainsi, tous les mis en examen détenus sont
entraînés par cet effet indirect.
654. Autre effet croisé de la multiplicité des mises
en examen : le cas du refus de donner le code de
déverrouillage de son téléphone. - Une autre situation
en matière de délinquance organisée mérite d'être citée,
tant elle est fréquente : elle concerne le mis en examen
ayant refusé de fournir le code de déverrouillage de son
66. Cette considération est particulièrement prégnante dans les dossiers
d'infraction à la législation sur les stupéfiants dans lesquels le nombre
de mis en examen est toujours élevé, pouvant aller jusqu'à une vingtaine
de personnes.
67. Il faut rappeler qu'en application de l'article 187 du Code de procédure
pénale, le principe est celui de la continuation des investigations malgré
une requête en annulation, sauf décision contraire de la chambre de
l'instruction.
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