Droit & Pratique professionnelle - Droit et pratique de la lutte contre la criminalité organisée - 1re - 247

LES SPÉCIFICITÉS DU CONTENTIEUX DE LA CRIMINALITÉ ORGANISÉE
* La transmission intégrale du dossier, de sa copie
numérisée et la bonne lisibilité des photographies
(notamment des surveillances éventuelles) ;
* L'accès facilité aux différents éléments probatoires
(accès aux interceptions téléphoniques (PNIJ), aux
facturations détaillées et aux données de géolocalisation
des prévenus...). À ce titre et pour éviter toute
recherche inutile durant les débats, il est utile que les
services enquêteurs annexent à leurs procès- verbaux
d'analyse des facturations détaillées et/ou aux données
de géolocalisation, soit en pièce jointe soit directement
dans le procès-verbal, les extraits ayant permis
leur analyse.
754. Le contrôle du périmètre de l'enquête. - Il est
important que le juge d'instruction et le parquet déterminent
ou à tout le moins aient conscience des capacités
de jugement de la chambre correctionnelle saisie
et éventuellement adaptent le traitement du dossier :
* Combien de prévenus au maximum dans un même
dossier, la formation correctionnelle est-elle en capacité
de juger (taille de la salle d'audience, capacité
maximum du box des détenus, mise à disposition des
escortes dédiées sur le temps du procès et au délibéré,
fonctionnement de la chambre correctionnelle
au regard des moyens humains de magistrats et de
greffe...) ?
* Combien de jours d'audience au maximum peut-on
consacrer à une même affaire ?
* Peut-on envisager des disjonctions/CRPC, des modes
de poursuites alternatifs (pour les prévenus secondaires),
avec communication des éléments de procédure
à l'enquête principale ?
* Est-on parvenu à circonscrire le périmètre de l'enquête
dans l'espace (à une cité, un réseau de fournisseurs...)
ou dans le temps (laisser les investigations
perdurer indéfiniment dans l'attente d'une hypothétique
saisie de produits stupéfiants ou l'interpellation
du principal mis en cause sur mandat de recherches
ou mandat d'arrêt est le meilleur moyen d'affaiblir
l'enquête) ?
755. Le contrôle de la cohérence des poursuites.
- Les investigations doivent permettre de
recueillir les preuves suffisantes pour motiver la prise
de décision sur tous les éléments justifiant le renvoi
mais également le non-lieu ou les non-lieux partiels. Le
contrôle doit donc porter :
* Sur toutes les infractions visées à la prévention (vérifications
nécessaires pour caractériser chaque élément
constitutif, vérifications portant sur la date et le lieu
des faits) ;
* Sur tous les mis en examen / prévenus ;
* Sur les éléments à charge et à décharge au fur et à
mesure des interrogatoires et de l'évolution du dossier
(vérification des alibis, vérifications des dates d'incarcération
d'un mis en examen s'il a été en détention
pendant la période de prévention).
Cette recherche de cohérence doit également se traduire
dans le choix des qualifications retenues, les éventuelles
doubles saisines, les poursuites retenues d'un prévenu
à l'autre, les périodes de prévention, les saisies ; en
bref, il convient de vérifier l'adéquation des éléments
probatoires avec les faits poursuivis au dossier. Ce travail
préparatoire revêt une importance essentielle et se
traduit souvent au cours de l'audience par des débats
sur des qualifications surabondantes.
En l'espèce, la règle du « Ne bis in idem » définie par
la chambre criminelle le 26 octobre 2016105
et avant
les derniers arrêts du 15 décembre 2021106
2022107
et du 9 juin
apportait une réelle clarté au débat judiciaire :
« Les faits qui procèdent de manière indissociable d'une
action unique caractérisée par une seule intention coupable
ne peuvent donner lieu, contre le même prévenu,
à deux déclarations de culpabilité de nature pénale,
fussent-elles concomitantes ».
On peut comprendre qu'avec ce revirement, la Cour
cherche à préserver le droit des parties civiles (hypothèse
de partie civile constituée sur une seule des
infractions) et permette au juge de disposer d'un panel
de sanctions élargies (au travers des peines complémentaires).
Néanmoins, la possibilité de retenir plusieurs
qualifications pour « appréhender l'action délictueuse
105. Cass. crim., 26 oct. 2016, n° 15-84552, Bull. crim. 2016, n° 276.
106. Sur le « ne bis in idem », v. note explicative relative à cass. crim., 15 déc.
2021, n° 1387 et n° 1390 ; Cass. crim., n° 21-81864.
107. Cass. crim., 9 juin 2022, n° 21-80237.
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