Droit & Pratique professionnelle - Droit et pratique de la lutte contre la criminalité organisée - 1re - 253

LES SPÉCIFICITÉS DU CONTENTIEUX DE LA CRIMINALITÉ ORGANISÉE
Inspiré par la législation européenne et suivant l'exemple
italien, ce dispositif est très rarement utilisé en France,
l'organisation administrative française ayant été conçue
autour de la commission nationale de protection et de
réinsertion et se résumant souvent à l'octroi d'une
identité d'emprunt et aux mesures de protection. Pour
autant, il ne serait pas impossible d'imaginer à l'avenir
que les conseils se saisissent de la seconde partie du
champ d'application et sollicitent du tribunal des exemptions
de peine pour un acte de repentir avéré. À ce titre,
il est étonnant de constater que les avocats invoquent
rarement les dispositions de l'article 132-78 du Code
pénal permettant la diminution ou l'exemption de peine.
E. Le délibéré
771. Étapes. - Lieu de fantasmes pour tous les avocats
de la défense qui rêvent d'y assister au moins une
fois dans leur carrière, le délibéré est en réalité un temps
de travail rythmé d'automatismes pour les magistrats
du siège :
* Le tribunal passe en revue les pièces de procédure
ou les questions nécessitant des précisions et discute
des arguments soulevés par les réquisitions et
les plaidoiries ;
* Le tribunal aborde la culpabilité de chaque prévenu
sur chacun des faits, vérifie les périodes et lieux de
prévention, examine l'ensemble des éléments à charge
et à décharge ;
* Le tribunal délibère ensuite sur les peines en cas de
culpabilité en tenant compte des situations personnelles
(récidive, conduite en détention, pièces nouvelles
de personnalité).
Les chambres traitant des dossiers de délinquance organisée
étant souvent des compositions fixes, il convient
de ne pas sous-estimer les habitudes professionnelles
du travail exercé en commun et de se référer à la jurisprudence
habituelle de la chambre.
772. Prononcé du délibéré. - Il convient de distinguer
les dossiers comportant des détenus qui nécessitent
une prise de décision urgente voire immédiate et
les dossiers financiers, économiques, de santé publique
ou accidents collectifs où les délibérés sont rendus avec
le jugement complet.
1. Les dossiers avec prévenus détenus
773. Le tribunal dispose toujours de la possibilité de
mettre en délibéré à bref délai si l'audience se termine
nuitamment. Si la combinaison des articles 179 et 464-1
du Code de procédure pénale ainsi que la jurisprudence
n'imposent pas de statuer sur la poursuite de la détention
provisoire, il est conseillé de rappeler aux prévenus
qu'ils restent maintenus en détention provisoire jusqu'au
prononcé du délibéré dont la date doit être fixée avec
précision. Le prévenu conserve toujours la possibilité
de solliciter une demande de mise en liberté (« à tout
moment » précise l'article 148), il est donc essentiel de
limiter autant que possible le temps du délibéré.
Compte tenu de la complexité des faits évoqués, le prononcé
ne doit pas se limiter à l'énoncé des peines mais
doit évoquer, même de manière succincte, les éléments
de faits, de droit et de personnalité qui ont conduit à la
décision du tribunal.
Cet énoncé très synthétique présente deux avantages
non négligeables : il permet à toutes les parties, dans
l'attente du jugement qui est rarement rédigé dans les
10 jours, d'envisager ou non un appel. Le délibéré présenté
synthétiquement à l'oral entraîne également une
diminution du nombre de recours « conservatoires ».
2. Les dossiers avec prévenus libres
774. Ces dossiers sont systématiquement mis en
délibéré, notamment en raison des écritures déposées
par les conseils avant la mise en délibéré. Les chambres
financières ont la plupart du temps la possibilité de
rédiger le jugement durant le temps de délibéré. Ces
décisions souvent complexes nécessitent la préparation
pour le délibéré d'une version expurgée rendant intelligible
la décision du tribunal sur les principaux points
de droit tranchés et sur l'analyse des relaxes ou des
décisions de culpabilité rendues.
Dans le cas de dossiers à fort retentissement médiatique,
il est conseillé de transmettre ce document de
synthèse à la presse et de veiller à ce que le magistrat
en charge de la communication dispose de cette
même version pour répondre aux éventuelles questions
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