Droit et Société - Volume 63 - Droit, justice et changement social - 165

POUR UNE THÉORIE SOCIOLOGIQUE DU CHANGEMENT
vement s'accompagne d'une forme de déprofessionnalisation de l'activité juridique,
comme on peut le constater en matière d'autoreprésentation 100 ou de certaines
activités criminelles exigeant plutôt une intervention de nature sociale.
C'est par exemple le cas en matière d'exploitation des aînés 101, mais aussi dans
le cadre de situations exigeant la création de tribunaux dits thérapeutiques ou
spécialisés en matière de violence conjugale, d'itinérance, de dépendance et de
consommation de drogue ou d'alcool 102. C'est également le cas en matière de
médiation civile dès lors que la fonction de tiers est assumée par un non-juriste
103. Dans certains cas, la désinstitutionnalisation des activités de justice transite
par des services périjuridiques qui font appel à des parajuristes ou à des
plateformes informatiques de règlements des différends, comme il en existe actuellement
en matière de droit de la consommation 104. Il en va de même du recours
à des formulaires Web en matière de petites créances, qui allègent le travail-conseil
des employés du greffe civil ou des centres de justice de proximité
servant systématiquement de centres de référence aux fonctionnaires du greffe
débordés par la demande. Sur une autre échelle, c'est également le cas des plateformes
proposant des informations juridiques spécialisées 105.
Bien sûr, la désinstitutionnalisation des services juridiques et judiciaires sert
souvent les besoins du système de justice lui-même. Ainsi, la reconnaissance juridique
de la médiation familiale a d'abord visé à répondre à la crainte d'une
inflation des requêtes en modification des pensions alimentaires, dans la foulée
d'une réforme prévoyant la défiscalisation des pensions 106. De même, les programmes
de mesure de rechange pour adultes sont pour l'essentiel devenus une
nécessité du fait de l'allongement démesuré des délais en matière de justice criminelle
et pénale et de l'engorgement des tribunaux 107.
100. Emmanuelle BERNHEIM et Richard-Alexandre LANIEL, « Un grain de sable dans l'engrenage
du système juridique. Les justiciables non représentés : problèmes ou symptômes ? », dans Recueil
annuel de Windsor d'accès à la justice, 31, 1, 2013, p. 47-68.
101. Catherine ROSSI, Jennifer GRENIER, Raymonde CRETE et Alexandre STYLIOS, « L'exploitation
financière des personnes aînées au Québec : le point de vue des professionnels », dans Revue
générale de droit, 46, 2016, p. 99-153 ; et Catherine ROSSI et Robert CARIO, « Restorative Justice
: Acknowledged Benefits Versus Emerging Issues », dans International Journal on Criminology,
4, 2, 2016, p. 1-14.
102. Dominique BERNIER, Le droit pénal dans le continuum des soins de santé, réflexions sur le rôle
des acteurs du système judiciaire et sur les mécanismes de protection de l'usager de drogue ou
d'alcool dans les formes de prise en charge thérapeutique, Thèse de doctorat, Faculté des études
supérieures en droit, Université d'Ottawa, Ottawa, 2017.
103. C'est notamment le cas des membres de l'Institut de médiation et d'arbitrage du Québec, en
ligne : (dernière consultation : 27 février 2022).
104. On consultera le site PARLe, en ligne : (dernière
consultation : 27 février 2022).
105. On pense notamment ici à Éducaloi, en ligne : (dernière consultation
: 27 février 2022).
106. Consulter le chapitre 3 de cet ouvrage.
107. On lira avec intérêt à ce propos les communiqués de presse du Ministère de la justice du Québec,
en ligne :
(dernière consultation : 27 février 2022).
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DROIT ET SOCIÉTÉ, VOL. 63, 2024

http://www.imaq.org/ https://www.opc.gouv.qc.ca/a-propos/parle/ https://www.educaloi.qc.ca/ https://www.newswire.ca/fr/news-releases/le-gouvernement-respecte-ses-engage

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