Bibliothèque constitutionnelle et de science politique - Tome 170 - Le gouvernement de fait de la Révolution à la Libération - 266

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LE GOUVERNEMENT DE FAIT DE LA RÉVOLUTION À LA LIBÉRATION
et ses conséquences sur la sécurité juridique. En somme, la décision vise autant à
assurer la stabilité de la situation de l'acquéreur dépossédé (en préservant son action
en garantie) qu'à consacrer la légitimité du droit du souverain restauré.
421. Le pragmatisme des juges met en évidence le fossé entre le principe de
l'usurpation et son application concrète. En 1831, les débats qui portent sur le régime
imputable aux actes du gouvernement de fait et qui ouvrent la possibilité de leur validité
sont alors une conséquence logique des évolutions du temps.
§2. LE TOURNANT DE 1831 : DÉBATS ET DÉCISIONS AUTOUR
DE LA VALIDITÉ DES ACTES DU GOUVERNEMENT DE FAIT
422. Les transformations politiques qui découlent de la révolution de Juillet
contribuent à l'essor de la doctrine du gouvernement de fait sur la scène politique41.
Le régime juridique imputable aux actes fait l'objet d'un regain d'intérêt, à l'occasion
d'une affaire source de riches débats à la Chambre des députés en 1831. Napoléon
Bonaparte, entre le 1er
mars et le 22juin 1815, c'est-à-dire de son débarquement au
golfe Juan jusqu'à son abdication à la suite de la défaite deWaterloo, avait octroyé
décorations et avancements militaires. Lors de la Seconde Restauration, Louis XVIII
promulgue plusieurs ordonnances dans le but de les annuler, les 28juillet et 1er
août
1815. La première vise à assainir les finances en régularisant des dépenses relatives à
des traitements militaires effectuées par Napoléon, qui n'ont « aucun caractère légal,
puisqu'elles ne sont autorisées par aucun acte émané de notre autorité ». Certaines de
ces dépenses ayant déjà été acquittées, elles sont légitimées a posteriori par le gouvernement
sur le fondement de la « clémence » et de la «justice » du Roi ; en revanche,
les soldes et indemnités qui n'ont pas encore été versées aux officiers pour des
grades ou emplois accordés par Napoléon ne seront pas réglées42. Les ordonnances du
1er
août déclarent purement et simplement « nulles de plein droit » les nominations,
promotions et réintégrations dans l'armée prononcées « du temps de
l'usurpation »43. Le 26 février 1831, deux pétitions d'officiers, en date des 7 novembre
et 27 décembre 1830, sont remontées devant la Chambre basse. Elles ont pour
objet l'abrogation des ordonnances de Louis XVIII, qui annulaient des décorations et
avancements dont ils estimaient devoir bénéficier44. Le 26 août, elles débouchent sur
une proposition de Boissy d'Anglas45. Dans les débats, transparaît une critique de la
nullité substantielle, fondée notamment sur des arguments tirés de l'École du droit
naturel moderne (A). Cette critique débouche sur deux propositions différentes quant
41. Cf. Partie I - Titre I - Chapitre 1, nº 94 et s.
42. Ordonnance du 28 juillet 1815portant régularisation de toutes les dépenses qui ont eu lieu par le
département de la guerre, depuis le 20 mars 1815 (Bulletin des lois,7e série, t. 1, nº 48, p. 97).
43. Ordonnance du 1er
août 1815 qui annule les nominations etpromotions à des grades militaires, et
série, t. 1, nº 31, p. 74). Une seconde ordonnance du même jour vient
la réintégration sur le tableau d'activité, des officiers en retraite, qui ont eu lieu pendant le temps de
l'usurpation (Bulletin des lois,7e
préciser les modalités de traitement des officiers et employés de l'armée, ainsi que les droits qui leur seront
accordés ou refusés, selon qu'ils se sont joints, ou non, au « gouvernement illégal » (Bulletin des lois,
7e
pas un cas isolé. Comme le rapporteur le relève, quatre pétitions allant en ce sens ont déjà été renvoyées au
ministre de la Guerre, trois durant les séances des 26 novembre et 18 décembre 1830 à la Chambre des
députés et une autre durant la séance du 7 décembre 1830 devant la Chambre des pairs (ibid.).
45. Séance du 26 août 1831 (Moniteur universel, 27 août 1831, p. 1464).
série, t. 1, nº 32, p. 75).
44. Séance du 26 février 1831 (Moniteur universel, 28 février 1831, p. 417). Ces demandes ne sont

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