Bibliothèque constitutionnelle et de science politique - Tome 171 - La représentation coutumière en droit constitutionnel canadien et français - 214

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LA REPRÉSENTATION COUTUMIÈRE EN DROIT CONSTITUTIONNEL
De plus, en étant ouvert à tout représentant d'une organisation autochtone désireuse
de prendre la parole, le groupe de travail échappe aux règles qui prévalent dans les
autres structures onusiennes où seuls les États et les ONG accréditées peuvent participer82
.
352.
Par la suite, les autochtones réussissent aussi à mettre en place, « par
. La première modalité est celle des assemblées générales, aussi nommées
la force de la coutume, deux modalités de participation dans les groupes de travail
»84
caucus, durant lesquelles les informations s'échangent et l'ordre du jour est discuté.
La seconde modalité est le principe de la décision par consensus, « par
lequel rien ne peut être adopté sans l'assentiment de la totalité des organisations
présentes, ce qui donne force à la voix autochtone et conforte le sentiment de
son unité auprès des observateurs extérieurs »85
. Le consensus n'est pas le seul
mécanisme à s'immiscer dans ces sommets annuels. En effet, les réunions internationales
restent l'occasion d'affirmer et de montrer aux yeux des gouvernants
certaines coutumes diplomatiques ancestrales86
. Par exemple, le 20 septembre
1977, lors de leur entrée au Palais Wilson, les autochtones nord-américains
82. Le premier président élu du Groupe de travail en 1982 témoigne ainsi : « À cette époque,
toutefois, presqu'aucune organisation autochtone n'avait de statut consultatif auprès de l'ECOSOC,
ce qui rendait difficile leur participation. [...] Or les meilleurs experts étaient les représentants
autochtones eux-mêmes. Bien que cela constituât une rupture complète avec la tradition et rencontrât
quelques objections, le Néerlandais Theo Van Boven, alors directeur du Centre des Nations unies
pour les droits de l'homme, nous soutint. Le groupe de travail fut ainsi ouvert au représentant
autochtone et, au fil des années, ceux-ci vinrent en grand nombre du monde entier. Avec le recul, il est
clair que la voie a ainsi été ouverte à l'émergence d'un mouvement autochtone mondial ». Voir,
Asbjorn Eide, « Les peuples autochtones, le Groupe de travail sur les populations autochtones et
l'adoption de la déclaration des nations sur les droits des peuples autochtones », dans Claire Charters
et Rodolfo Stavenhagen (dir.), La déclaration des droits des peuples autochtones : genèse, enjeux et
perspectives de mise en œuvre, Paris, L'Harmattan, 2013, p. 36-50, spé. p. 38.
83. La première évolution des normes internationales du fait des autochtones concerne l'accréditation
des organisations autochtones comme consultants auprès de l'ECOSOC, alors que très peu
d'organisations non gouvernementales bénéficiaient de ce statut à l'époque, constituant en une
volonté d'assouplissement pour pouvoir leur donner la parole.
84. Irène Bellier, « La participation des Peuples autochtones aux Nations unies : intérêts et
limites d'une présence institutionnelle », op. cit., p. 187.
85. Ibid., p. 187-189. Le consensus est à relativiser, car « lorsque des divergences irréductibles
apparaissent, une solution de compromis est proposée qui prend deux formes. La première qui n'a pas
les faveurs du caucus est de faire apparaître les signatures des organisations qui soutiennent une position
majoritaire. La seconde consiste à demander aux organisations en désaccord de ne pas signaler
cette position en séance plénière afin de marquer toujours aux yeux des États l'idée d'une communauté
de vues autochtone malgré la diversité des expressions ».
86. Pour une description ethnographique de la scène onusienne dédiée aux questions
autochtones, voir, Irène Bellier, « Les peuples autochtones aux Nations unies : un nouvel acteur dans
la fabrique des normes internationales », art. cit., p. 65-66. L'auteure rapporte : « la file se reforme à
l'intérieur du sas de contrôle où, en ce jour d'ouverture de la dixième session de l'Instance permanente
sur les questions autochtones (ci-après l'Instance), chacun se défait, comme dans les aéroports, de ses
bijoux, plumes, perles, clochettes, couteaux cérémoniels, tambours, chapeaux, ceintures et pochettes ».
Elle ajoute : « es négociations internes ont eu lieu, en 2007, qui permettent depuis à une Kichwa de
l'Équateur de garder son chapeau pour la photo du badge, à un Mapuche du Chili de soustraire son
tambour sacré du passage aux rayons X, à des Papous d'introduire des lances dans l'enceinte, à une
délégation nord-amérindienne de réaliser un rituel de fumigation... Quelle importance faut-il accorder
à ces pratiques ? À première vue, elles peuvent paraître folkloriques, mais l'enquête montre qu'elles
se combinent avec des prises de parole très politiques, des manières originales de faire consensus et des
analyses techniques pointues ».
. Les autochtones semblent alors vecteurs, une nouvelle fois, d'une certaine évolution
des normes au sein des institutions internationales83

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