Bibliothèque constitutionnelle et de science politique - Tome 171 - La représentation coutumière en droit constitutionnel canadien et français - 22

22 LA REPRÉSENTATION COUTUMIÈRE EN DROIT CONSTITUTIONNEL CANADIEN ET FRANÇAIS
dans le droit positif étatique, qui dispose que « la loi est l'expression de la volonté
générale »4
sentants au Parlement5
tions coutumières, lesquelles sont notamment mentionnées à l'article 18 de la
Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones selon lequel
« les peuples autochtones ont [...] le droit de conserver et de développer leurs
propres institutions décisionnelles »6
et qui garantit la tenue d'élections régulières pour désigner les repré;
tandis que la troisième renvoie à l'expression des institu.
Ainsi, les exemples de Nouvelle-Calédonie
et de Colombie-Britannique rendent compte de situations complexes, mais similaires
en France et au Canada : les communautés autochtones, dont la cohabitation
avec l'État résulte de la colonisation, s'opposent parfois avec violence aux
modalités de la production d'une volonté générale et commune à l'ensemble de
l'ordre juridique étatique.
4. Dès lors, pour apaiser et éviter les situations conflictuelles, pour concilier
la volonté générale et la volonté autochtone, des compromis sont trouvés et intégrés
dans le droit positif. En Colombie-Britannique, par exemple, les manifestations
contre le gazoduc ont conduit, en 2020, à l'adoption d'un protocole
d'entente qui reconnaît les « maisons » Wet'suwet'en et leurs chefs héréditaires
comme le « système de gouvernance » compétent pour mener à bien les négociations
en vue d'un accord gouvernemental7
. Dans la continuité des accords déjà
conclus avec d'autres communautés, celui-ci permettra de créer une véritable
citoyenneté wet'suwet'en, de donner la compétence législative à un organe
désigné, et de reconnaître le rôle des Aînés dans l'interprétation des coutumes.
Selon la Cour suprême du Canada, ces accords gouvernementaux « permettent
de concilier la souveraineté autochtone préexistante et la souveraineté proclamée
de la Couronne »8
.
4. Déclaration du 26 août 1789 des droits de l'homme et du citoyen, art. 6.
5. Selon la Charte canadienne des droits et libertés, partie I de la Loi constitutionnelle de 1982
[annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, c. 11 (R.-U.)], art. 3 et la Constitution française du
4 octobre 1958, art. 3. L'ambivalence de ces conceptions, entre volonté du Parlement et élection, sont
notamment affirmées dans les décisions de la Cour suprême du Canada, Frank c. Canada (Procureur
général), [2019] 1 R.C.S. 3, para. 155 : « Si le Parlement, formé de l'ensemble des députés, représente
" toutes les circonscriptions, tout le territoire, tous les partis, tous les intérêts, tous les citoyens, tous les
habitants " [...], le droit de vote garanti par l'art. 3 repose sur le principe voulant que les électeurs
votent pour un représentant de leur collectivité ». La décision du Conseil constitutionnel français
présente une approche similaire : « Si députés et sénateurs sont élus au suffrage universel, direct pour
les premiers, indirect pour les seconds, chacun d'eux représente au Parlement la Nation tout entière ».
Voir, CC, n° 99-410 DC du 15 mars 1999, Loi organique relative à la Nouvelle-Calédonie, J.O.R.F. du
21 mars 1999, p. 4234, cons. 9.
6. Assemblée générale des Nations unies, Résolution 61/295, Déclaration des Nations unies sur
les droits des peuples autochtones, 13 septembre 2007, A/RES/61/295, art. 18.
7. Gouvernement du Canada, Protocole d'entente entre le Canada, la Colombie-Britannique et les
Wet'suwet'en comme convenu le 29 février 2020, Gouvernement du Canada, signé le 14 mai 2020 en ligne :
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8. Nation haïda c. Colombie-Britannique (ministre des Forêts), [2004] 3 R.C.S. 511, para. 20 :
« les traités permettent de concilier la souveraineté autochtone préexistante et la souveraineté proclamée
de la Couronne, et ils servent à définir les droits ancestraux garantis par l'art. 35 de la Loi constitutionnelle
de 1982 ». Voir aussi, Première nation Tlingit de Taku River c. Colombie-Britannique
(Directeur d'évaluation de projet), [2004] 3 R.C.S. 550, para. 42. Pour une interprétation, Voir, Jeremy
Webber, « We Are Still in the Age of Encounter: Section 35 and a Canada beyond Sovereignty », dans
Patrick Macklem et Douglas Sanderson (dir.), From recognition to reconciliation. Essays on the
Constitutional Entrenchment of Aboriginal and Treaty Rights, Toronto, Presses de l'Université de
Toronto, 2016, p. 63-99, spé. p. 71-72.
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