Bibliothèque constitutionnelle et de science politique - Tome 173 - Le principe de responsabilité dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel - 135

LA FONCTION DOMINANTE
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qu'il convient de lui reconnaître dans le réseau relationnel qu'implique la vie des
affaires que la loi devait être adoptée. Cette dimension semble ici échapper au
Conseil constitutionnel dont le raisonnement demeure focalisé sur l'intérêt général
que satisferait la stimulation de la vie économique par une limitation de la
responsabilité pesant sur le dirigeant. L'indisponibilité du procès-verbal de délibération
empêche d'affirmer avec certitude que cet aspect relationnel de la responsabilité
a été délibérément éludé par le Conseil, à la faveur d'une analyse
économique du droit68
du juge de se cantonner aux arguments soulevés par les parties69
, ou si la rédaction de la décision correspond à une volonté
.
B. UNE PROTECTION NON EXCLUSIVE AU PRINCIPE
DE RESPONSABILITÉ
162. Une autre nuance peut être apportée à l'idée selon laquelle le principe de
responsabilité se caractérise par sa vocation cohésive. En effet, il serait excessif de
soutenir que le raisonnement relationnel, tourné vers la cohésion entre les parties,
est exclusivement déployé par le juge constitutionnel lorsqu'il se fonde formellement
sur le principe de responsabilité. La décision du 14 mai 201270
en fournit une
parfaite illustration. En l'espèce, le juge constitutionnel était saisi d'une QPC par
l'association Temps de vie. Étaient en cause trois articles du Code du travail. Le
Conseil avait circonscrit l'objet de son contrôle au 13° de l'article L. 2411-1, à
l'article L. 2411-3 et à L. 2411-18. La lecture combinée de ces dispositions offrait
au salarié membre du conseil ou administrateur d'une caisse de sécurité sociale la
même protection qu'un délégué syndical. Ainsi, en vertu de l'article L. 2411-18, le
licenciement d'un tel salarié était tenu au respect des modalités de licenciement
prévues à l'article L. 2411-3. Le licenciement de ces salariés protégés ne pouvait
en effet intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail, à condition que
le salarié exerce toujours son mandat ou s'il a cessé de l'exercer depuis moins de
six mois. La protection valait également pour les candidats aux mandats qui font
l'objet de la protection durant trois mois à compter de la publication des candidatures.
En cas de manquement aux règles établies par les dispositions contestées,
l'employeur s'exposait à des sanctions civiles et pénales. Ainsi, un licenciement
non autorisé par l'inspection du travail est nul de plein droit. Selon les hypothèses,
la loi prévoyait différentes sanctions découlant de la nullité du licenciement. En
cas de réintégration, l'employeur est condamné au versement d'une indemnité
compensatrice de la perte des salaires entre le licenciement et la réintégration du
salarié protégé, mais aussi à l'indemnisation des autres chefs de préjudice qui en
aura découlé. Dans l'hypothèse dans laquelle les parties trouvent un accord pour
ne pas avoir à procéder à la réintégration - c'est l'hypothèse la plus courante -,
elles peuvent conclure une transaction réglant les conséquences pécuniaires de la
68. T. SACHS, « Quand la sécurité juridique se perd dans l'analyse économique », préc., p. 1019 ;
J. MOULY, « Le plancher d'indemnisation des licenciements injustifiés peut varier selon les effectifs
de l'entreprise », Droit social, 2016, p. 1065.
69. Il faut toutefois noter que le représentant du liquidateur judiciaire avait mobilisé un argument
typiquement relationnel dans ses observations orales. Pour défendre la disposition, il explique en
effet que la loi ainsi rédigée permettait au dirigeant de peser face aux actionnaires et d'engager un
dialogue, en invoquant la responsabilité qu'il encourt. Le dispositif permettrait ainsi de décoller l'intérêt
de l'entreprise de l'intérêt des actionnaires.
70. Cons. const., décision n° 2012-242 QPC du 14 mai 2012, Association Temps de vie [Licenciement
des salariés protégés au titre d'un mandat extérieur à l'entreprise], JO du 15 mai 2012, p. 9096
texte n° 2, Rec., p. 259.

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