Bibliothèque de droit public - Tome 343 - Le droit à l'alimentation et la lutte contre la précarité alimentaire en France - 209

LA CONSÉCRATION DU DROIT À L'ALIMENTATION EN DROIT INTERNATIONAL
comme une force ou une faiblesse283
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. Une faiblesse évidente pour l'opposabilité de
ce droit, si les différentes dimensions de cette polysémie ne sont pas correctement
identifiées, définies et articulées entre elles. Une force si on y voit la reconnaissance
et l'opposabilité progressive de plusieurs des dimensions composant le droit
à l'alimentation.
348. On pourrait presque généraliser ce constat à l'ensemble des écrits sur le
droit à l'alimentation. Une telle perspective permet de situer les écrits entre eux et
de justifier certaines appellations spécifiques conférées au droit à l'alimentation.
En effet, l'imprécision actuelle entourant les contours du droit à l'alimentation
amène les auteurs à multiplier les adjectifs pour qualifier et préciser leurs propos.
C'est ainsi que l'on peut comprendre par exemple les appellations « droit à une
nourriture saine et suffisante », « droit à une alimentation saine, suffisante et
nutritive », « droit à la sécurité sanitaire », « droit à une alimentation durable »,
etc. Chacune de ces expressions peut être perçue comme un moyen d'expliciter
lesquelles des dimensions entourant l'accès à l'alimentation sont considérées et
traitées plus particulièrement dans le texte, la jurisprudence ou l'écrit de doctrine
s'y référant (la quantité, la qualité, le volet nutritionnel, le volet sanitaire, la durabilité,
etc.). Les différences entre les dénominations peuvent aussi avoir pour
objectif de préciser qui sont les titulaires considérés. Elles peuvent permettre
d'expli citer que ce droit peut être compris comme un droit individuel, un droit
étendu aux personnes dont l'individu a la charge ou un droit collectif. En ce sens,
les expressions « droit des peuples à se nourrir eux-mêmes » ou « droit à la souveraineté
alimentaire »284
renvoient indéniablement à une dimension collective du
semble délibéré pour bien signifier que le « sujet de ce
droit reconnu. De même, le choix de P. Meyer-Bisch d'utiliser le terme « droit de
nourrir et de se nourrir »285
droit apparaît dans les traits de celui qui a faim mais aussi dans celui qui se trouve
dans la situation insupportable de ne pas pouvoir nourrir ceux dont il a la
charge »286
. C'est alors une expression qui explicite la portée du droit reconnu, par
. Toutefois, pour certaines expressions, la classification en fonc.
l'article
25 de la DUDH ou l'article 11 du PIDESC, pour la personne « elle-même
et sa famille »287
tion des titulaires considérés est moins aisée288
283. Ibid., p. 624.
284. En ce sens, voir : Michel Buisson et Priscilla Claeys, « Peut-on assurer le droit à l'alimentation
sans la souveraineté alimentaire ? », in Penser une démocratie alimentaire, vol. 2, INIDA, 2014,
pp. 405-411 ; Céline Fercot, « La souveraineté alimentaire : l'alimentation au croisement de la politique
et du droit », op. cit.
285. Patrice Meyer-Bisch, « Le droit de nourrir et de se nourrir - Dimensions économiques et
culturelle d'un droit humain », op. cit.
286. Patrice Meyer-Bisch, « Liminaire », op. cit., p. 9.
287. Article 11 du PIDESC.
288. Par exemple L. Bourges estime que les appellations « droit à l'alimentation adéquate » ou
« droit à être à l'abri de la faim » conduisent à la reconnaissance de droits individuels, alors que le
terme « droit à la sécurité alimentaire » désigne des droits collectifs, in : Leticia A. Bourges, La distinction
du produit agricole et du produit agroalimentaire dans la dynamique du droit rural, Thèse de
doctorat en droit sous la direction de Joseph Hudault, Université Panthéon-Sorbonne, 2013, p. 613.
Mais ce n'est pas l'analyse de Dominique Rosenberg pour qui le droit à la sécurité alimentaire « constitue
un droit individuel fondamental que tout être humain peut revendiquer et exercer » et qui a fait
l'objet de « collectivisation dans les instruments conventionnels au profit de certaines catégories de
personnes - prisonniers, femmes, enfants, personnes handicapées - jugées plus vulnérables en cas
d'insécurité alimentaire », in : Dominique Rosenberg, « Le droit à la sécurité alimentaire : réponses et
non réponses du droit international », op. cit., p. 403.

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