Droit & Pratique professionnelle - Droit du handicap - 1re - 211

LA VIE DE COUPLE
trente ans à tout intéressé, elle ne peut toutefois être
exercée, du vivant des deux époux, par les collatéraux
des époux ou par leurs enfants nés d'un autre mariage.
Cette restriction à agir résulte de l'article 187 du Code
civil, qui précise que les personnes qu'il désigne ne
peuvent agir que dès lors qu'elles y ont un intérêt né
et actuel, ce dont il peut être déduit que le seul intérêt
que leur reconnaît la loi est l'intérêt patrimonial issu de
leur vocation successorale. Dès lors, leur intérêt moral
à protéger leur proche des conséquences d'un défaut
de consentement lié à une altération de ses facultés
mentales ne devrait pas être pris en compte.
477. Nullité pour défaut de consentement et
charge de la preuve. - La difficulté de l'action en nullité
du mariage pour défaut de consentement, dans le
cas de l'époux atteint d'un trouble mental, tient à la
preuve de l'impossibilité de concevoir un consentement
valable au moment précis de la célébration du
mariage. Autrement dit, si la maladie mentale laisse à la
personne des intervalles de lucidité, le demandeur à l'action
doit prouver que le mariage a été célébré en dehors
d'un tel intervalle. Pendant un temps, la jurisprudence
semble avoir retenu une approche globale de la faculté
à consentir en présence d'une maladie ou d'un trouble
mental, approuvant les juges du fond, dont l'appréciation
est d'ailleurs souveraine22
, d'avoir admis le défaut
de consentement, dans le cas d'un époux atteint de
démence sénile, en relevant que la maladie ne permettait
pas de supposer la possibilité d'un intervalle lucide au
moment de la célébration23
. Un tel infléchissement n'a
toutefois pas perduré, la Cour de cassation étant revenue
par la suite à une solution des plus classiques, qui
marque le dernier état de la jurisprudence sur ce point24
.
La Cour a alors clairement affirmé qu'il appartient au
demandeur à l'action en nullité du mariage de prouver
le trouble mental au moment de la célébration, rejetant
le moyen qui invoquait que dès lors qu'il était établi que
l'époux du consentement duquel il était question était
habituellement atteint de troubles mentaux, il revenait à
22. Cass. 1re
civ., 29 janv. 1975, D. 1975.668, note hauser.
23. Cass. 1re civ., 28 mai 1980, n° 79-12.784, Gaz. Pal. 1980.2, pan. 557 ;
JCP G 1981.Il.19552, note rayMond.
24. Cass. 1re
civ., 2 déc. 1992, n° 91-11.428, Bull. civ. I, n° 299 ; D. 1993.409,
note Boulanger ; RTD civ. 1993.328, obs. hauser.
25. TGI Rennes, 9 nov. 1976, D. 1977.539, note Cosnard. - TGI Tarascon,
8 juill. 1981, Defrénois 1982, art. 32930, obs. Massip. - TGI Vesoul,
28 nov. 1989, D. 1990.590, note philippe.
26. C. civ., art. 212.
27. C. civ., art. 214.
28. Ce devoir peut être déduit de l'article 220-1 du Code civil, qui prévoit
l'intervention du juge lorsque « l'un des époux manque gravement à ses
devoirs et met ainsi en péril les intérêts de la famille ». Si les devoirs
doivent ici s'entendre comme l'ensemble des devoirs du mariage, aussi
bien personnels que pécuniaires, les intérêts mis en péril justifiant l'intervention
du juge sont avant tout les intérêts patrimoniaux. Sur l'application
de cet article et des mesures de crise en général, v. infra.
29. Si certaines décisions peuvent être citées qui considèrent comme fautif le
refus des relations sexuelles, ces décisions sont toutes antérieures à la loi
érigeant comme circonstance aggravante du viol le fait qu'il soit commis
par le conjoint. V. not. A.-M. leroyer, « Loi n° 2006-399 du 4 avr. 2006
renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple
ou commises contre les mineurs », RTD civ 2006, p. 402.
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la légataire et épouse, défenderesse à l'action, de prouver
que le consentement au mariage avait été exprimé
dans un intervalle lucide.
478. Vices du consentement : trouble mental et
erreur. - Le trouble mental, plutôt que de provoquer l'erreur
de la personne qui en est atteinte, emporte l'inexistence
de son consentement. En revanche, l'ignorance
de la part de son époux ou de son épouse de cet aspect
de son état de santé est susceptible d'emporter la nullité
pour erreur sur les qualités essentielles du conjoint, en
application de l'article 180 du Code civil. C'est du moins
ainsi qu'en ont jugé des juridictions de fond, dans des
décisions déjà anciennes25
. Les difficultés à prouver l'antériorité
du trouble mental devraient sans doute désormais
faire préférer la voie du divorce dans un tel cas.
§ 2 * Effets du mariage
479. Protection du conjoint handicapé. - Le
handicap, physique ou mental, de l'un des conjoints
le place dans une situation qui peut lui rendre difficile
l'accomplissement de ses devoirs de secours et d'assistance26
,
de contribution aux charges du mariage27
, mais
encore de bonne gestion des biens et des ressources du
ménage28
. En outre, le handicap peut interférer avec la
sexualité et la procréation. Toutefois, en admettant qu'il
existe un « devoir conjugal » sanctionné juridiquement,
ce qui est de plus en plus douteux29
, aucune faute ne
pourra être reprochée à l'époux qui n'entretient pas de
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