Droit & Pratique professionnelle - Droit du handicap - 1re - 319

LA GESTION DU PATRIMOINE
chacune de ces règles « a pour seul objet la sauvegarde
d'un intérêt privé »290
. Le contrat lésionnaire, conclu sous
l'empire d'un trouble mental ou pendant la période suspecte,
par une personne incapable ou une personne
habilitée qui a excédé son pouvoir de représentation,
peut être sanctionné à la demande du tuteur291
seule personne habilitée ayant un pouvoir de représentation,
si elle y a été autorisée par le juge des tutelles292
.
En revanche, la personne protégée par une curatelle
ou une habilitation familiale par assistance doit pouvoir
engager ces actions en nullité, avec l'assistance de son
curateur293
est attitrée.
ou de la personne habilitée. L'action en justice
La qualité à agir étant refermée sur l'auteur de l'acte,
assisté ou représenté par l'organe de protection, il faut
supposer que son intérêt à agir est présumé et qu'il a été
établi par la personne habilitée pour convaincre le juge
des tutelles de l'autoriser à engager l'action en justice.
L'utilité du contrat caractérise une objection au fond294
;
elle ne saurait être qualifiée de défaut d'intérêt pour être
sanctionnée par une fin de non-recevoir. De la qualification
de nullité relative, il faut tirer la possibilité pour
la personne habilitée de solliciter du juge des tutelles la
confirmation de l'acte nul295
. Il en est de même du curateur
ou du tuteur. Seul le mandataire à la protection future
n'a jamais besoin d'autorisation du juge pour engager
une action en nullité d'ordre patrimonial.
Après la mort de la personne protégée, ses héritiers
peuvent, à leur tour, agir en nullité des actes conclus par
leur auteur ou par le protecteur de manière irrégulière. Le
libellé des textes attribuant la qualité à agir aux héritiers
fait hésiter sur la nature de l'action en nullité. A priori, la
transmission universelle du patrimoine de la personne
protégée à ses héritiers fonderait la transmission de la
qualité à agir. Les héritiers qui continuent la personne
du défunt n'auraient pas de droit propre, mais dispose290.
C. civ., art. 1179, al. 2.
291. C. civ., art. 475, al. 1er
. Le tuteur n'a pas besoin d'être autorisé par le
juge des tutelles pour engager une action patrimoniale.
292. C. civ., art. 494-9, al. 4 ou 5.
293. C. civ., art. 468, al. 3.
294. C. civ., art. 1151.
295. C. civ., art. 494-6, al. 7.
raient du seul droit de leur auteur296
textes297
. Le libellé de certains
ne doit pas faire douter de l'analyse classique.
L'enjeu est de reporter le point de départ de la prescription
extinctive de l'action en nullité.
ou de la
730. Délai pour agir. - Dans tous les cas, l'action
en nullité ou en réduction est exercée dans le délai de
cinq ans prévu à l'article 2224 du Code civil298
. En visant
le nouveau délai de droit commun de la prescription
extinctive en remplacement de l'ancien article 1304 du
Code civil299
, le texte nous interroge sur le point de départ
de l'action en nullité.
Le premier point de départ de la prescription quinquennale
est la date à laquelle le contrat a été conclu de
manière irrégulière, mais, suivant les cinq causes de
nullité contractuelle, il faut envisager d'autres points de
départ. Si le fondement de la nullité est le défaut de capacité
ou le dépassement de pouvoir, le point de départ
est principalement la date de formation du contrat.
On pourrait envisager le report du point de départ à la
date d'ouverture de la succession au profit des héritiers
acceptants. Mais les héritiers présomptifs de la personne
protégée (curatelle, tutelle, habilitation familiale),
qui avaient pris connaissance de cet acte irrégulier au
cours de la mesure, avaient donc le moyen de saisir le
juge des tutelles pour qu'il statue sur ces « difficultés »300
;
s'ils ne l'ont pas fait, la prescription extinctive aurait pu
leur être opposée, dès lors que l'article 1152, 3° du Code
civil réserve le cas où la prescription « a commencé à
courir auparavant » contre les héritiers de la personne
protégée (curatelle, tutelle, habilitation familiale301
). L'argument
a été écarté par la Cour de cassation dans un
arrêt récent : l'héritier qui a eu la qualité de tuteur peut
se prévaloir du report de la prescription quinquennale
296. C. lesCa-d'espalunghe, La transmission héréditaire des actions en justice,
PUF, 1992. Adde, D. Bert, « Regard sur la transmission de l'action
en justice », D. 2006, chron., p. 2129.
297. V. C. civ., art. 414-2 et art. 1152, 3°.
298. C. civ., art. 465, al. 4 (curatelle ou tutelle) ; C. civ., art. 494-9, al. 6
(habilitation familiale).
299. C. civ., art. 1304, L. n° 1968-5, 3 janv. 1968, abrogé par ord. n° 2016131,
10 févr. 2016, entrée en vigueur le 1er
oct. 2016.
300. C. civ., art. 494-10, al. 1er
.
301. Sur l'article 1152 du Code civil issu de l'ordonnance n° 2016-131 du
10 févr. 2016, v. G. raoul-CorMeil, in t. douville (dir.), La réforme du
droit des contrats... Commentaire article par article, préc., spéc. p. 114.
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