Droit & Pratique professionnelle - Droit du handicap - 1re - 419

LA RESPONSABILITÉ CIVILE
adapter son logement à son handicap et bénéficier ainsi
d'un habitat en adéquation avec ce handicap après la
consolidation. Il inclut non seulement l'aménagement
du domicile préexistant mais éventuellement le surcoût
financier engendré, soit par l'acquisition d'un domicile
mieux adapté, soit par la location d'un logement plus
grand. Il comprend aussi les frais de déménagement et
d'emménagement »269
. Si le logement peut être adapté
(adaptation des sanitaires et de la cuisine, élargissement
des portes, monte escalier...), « l'ensemble des
dépenses doit être supporté par le responsable, sans
qu'il ne puisse exiger un déménagement qui diminuerait
ces frais, puisque la jurisprudence refuse d'imposer à la
victime une obligation de minimiser le dommage »270
victime doit prouver la nécessité des aménagements271
. La
.
Si le logement ne peut pas être aménagé et que la victime
est locataire, elle sera indemnisée pour le surcoût
de loyer représenté par la location d'un nouveau logement
plus adapté et le coût des aménagements du nouveau
logement272
la nécessité de l'achat d'un nouveau logement »275
ment adapté277
pris à bail278
. Il
lui appartient d'établir qu'elle ne peut pas aménager
l'immobilier existant276
, qu'elle ne peut louer un logeou
le caractère inadapté des logements
ou encore que les aménagements projetés
impliquent le bénéfice d'une situation pérenne,
excluant le caractère provisoire d'une location279
. Il
s'agit d'établir que « le handicap rend nécessaire des
aménagements incompatibles avec le caractère provisoire
d'une location » et que « l'acquisition ne procède
pas d'un choix mais d'une nécessité »280
. « Si la victime
est propriétaire, elle ne peut prétendre en principe qu'au
surcoût lié aux exigences du handicap, c'est-à-dire la
différence entre le prix d'achat d'un logement adapté
et la valeur du logement antérieur »281
.
. Elle peut aussi obtenir l'indemnisation
du coût d'acquisition d'un nouveau logement. La Cour
de cassation admet l'indemnisation de l'intégralité du
coût d'acquisition lorsqu'elle est rendue nécessaire par
les séquelles de l'accident273
. Un arrêt du 5 février 2015
énonce ainsi que « les frais d'acquisition et d'aménagement
de la maison exposés par la victime étaient en
relation directe avec l'accident et devaient être pris en
charge en totalité par le responsable, indépendamment
de l'économie réalisée par le non-paiement d'un
loyer »274
Il est admis que l'invalidité du demandeur « ne saurait
le priver du libre choix d'un logement tant que celui-ci
n'apparaît pas manifestement déraisonnable et totalement
inadapté à son handicap, qu'il ne saurait lui être
imposé a priori le choix d'une maison de plain-pied
et lui interdire l'acquisition, comme il projette, d'une
maison ancienne avec cave et étage, le seul aménagement
particulier qui en résulte étant la pose d'un
élévateur »282
.
. Il a été souligné que « cette solution ne saurait
rationnellement valoir qu'à l'égard d'une victime
locataire et encore faudrait-il que celle-ci justifie de
269. Rapport du groupe de travail chargé d'élaborer une nomenclature de
préjudices corporels, p. 33.
270. Y. laMBert-Faivre, S. porChy-siMon, Droit du dommage corporel, Dalloz,
2022, n° 180.
271. V. par ex. admettant la nécessité des aménagements : CA Nancy,
10 mars 2022, n° 20/02243. - CA Aix, 13 janv. 2022, n° 21/01496. -
CA Reims, 30 mars 2021, n° 20/00548, décidant qu'« il n'est pas
suffisamment démontré que l'acquisition d'un nouveau logement présenterait
un lien de causalité nécessaire avec l'accident. En revanche,
M. Y a suffisamment justifié de la nécessité d'aménager son logement
existant ».
272. M. le roy, J.-D. le roy, F. BiBal, A. guégan, n° 230, p. 254.
273. M. le roy, J.-D. le roy, F. BiBal, A. guégan, op. cit., n° 227.
274. Cass. 2e
p. 31, n. A. Coviaux.
Lorsque la victime est hébergée chez un proche (parent,
conjoint) qui prend en charge l'aménagement de son
propre logement, c'est encore la victime directe qui
réclame réparation de ce préjudice propre283
lorsque la victime ne réside pas au domicile de ses
. Mais
275. g. viney, P. jourdain, s. Carval, op. cit., n° 192 ; v. aussi Y. laMBertFaivre,
S. porChy-siMon, n° 180 : « C'est le critère de la nécessité de
l'acquisition au regard de la situation de la victime qui détermine la
décision du juge ».
276. Cass. 2e
civ., 15 avr. 2010, n° 09-14.137, estimant que la victime n'a
pas justifié la nécessité de l'achat immobilier.
277. CE, 27 déc. 2019, n° 421792.
278. Cass. 2e
siMon.
279. Cass. 2e
civ., 23 mai 2019, n° 18-16.561.
280. L. lazergue, « Le grand handicap dans la jurisprudence de la Cour de
cassation », Gaz. Pal., 5 août 2015, p. 8.
281. g. viney, P. jourdain, s. Carval, op. cit., n° 192.
282. Cass. 2e
10 févr. 2010, n° 08/02096. - Cass. 2e
civ., 5 févr. 2015, n° 14-16.015, Gaz. Pal., 28-30 juin 2015,
283. Cass. 2e
civ., 10 nov. 2005, n° 04-16.996. - V. aussi : CA Poitiers,
civ., 30 mars 2023, n° 21-19.314,
RCA 2023, com. 145, S. hoCquet-Berg, Gaz. Pal., 6 juin 2023, p. 58.
civ., 8 juill. 2004, n° 02-14.854.
419
civ., 8 juill. 2021, n° 20-15.106, D. 2021.1980, obs. S. porsChy
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