Revue - Revue française de Finances Publiques n°169-2025 - 105

Le dualisme juridictionnel est-il un obstacle ?
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à statuer chaque fois que la solution d'un litige demeure tributaire
d'une question soulevant une « difficulté sérieuse », dont la résolution
relève de l'autre ordre juridictionnel37
. Cette obligation réduit certes
l'incertitude d'une interprétation administrative ou judiciaire pour
entraîner une uniformisation de la règle applicable mais la notion de
difficulté sérieuse autorise une interprétation discrétionnaire de la norme
juridique. Tel est d'ailleurs le cas d'une question préjudicielle qui aurait
pu se poser à propos de l'interprétation d'une convention collective qui
avait une incidence fiscale sur l'indemnité de rupture38
. Selon Nicolas
Labrune, « au lieu de se fonder sur la jurisprudence établie de l'autre
ordre, le Conseil d'État a procédé lui-même à l'interprétation de la
convention collective, s'appropriant la jurisprudence judiciaire, qu'il
ne mentionne qu'incidemment »39
. Au-delà de la question préjudicielle,
l'autre voie de dialogue est d'acclimater les jurisprudences à une
interprétation convergente. Mais il subsiste un dernier élément de
blocage lié à l'indépendance des procédures.
10. Les divergences juridictionnelles peuvent conduire le juge
pénal à prononcer des sanctions pour fraude fiscale alors même que,
par ailleurs, le juge de l'impôt a prononcé la décharge intégrale des
impositions litigieuses. Le principe de l'autorité absolue de la chose
jugée au pénal reçoit une application singulière en matière fiscale compte
tenu de la dualité des ordres de juridiction. En application du principe
de l'indépendance des procédures, la Cour de cassation considère que
les décisions des juridictions administratives ne s'imposent pas à la
juridiction correctionnelle et n'ont pas au pénal l'autorité de la chose
jugée. Symétriquement, le Conseil d'État considère que les motifs
d'un jugement de relaxe tirée de ce que les faits reprochés ne sont
pas établis ou de ce qu'un doute subsiste sur leur réalité n'ont pas
d'autorité à l'égard du juge administratif40
. L'autorité pourtant absolue
du jugement répressif se trouve ainsi limitée aux seules constatations
de fait qui sont certaines. Pour éviter toute contrariété de jugement, la
doctrine a d'ores et déjà émis comme solution de bon sens l'instauration
d'un sursis à statuer automatique dans le cadre de la procédure pénale
37. Voir J. LESSI, « Les questions préjudicielles du juge administratif à l'autorité judiciaire »,
AJDA 2015, p. 274
38. CE, 23 janvier 2015, n° 360396, RJF 4/15, n° 355.
39. N. LABRUNE, « L'incomplète jurisprudence sur la plénitude de compétence du juge
fiscal », chronique, RJF/15.
40. Ces principes ont été récemment réaffirmés par la section du contentieux (CE, sect.
16 février 2018, no
Lebon, p. 41).
RFFP n° 169 - Février 2025
395371, Thomas, RJF 5/18 no 536, concl. É. CRÉPEY, p. 730 (C 536),

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