Revue - Revue française de Finances Publiques n°169-2025 - 239

Carences du principe de sincérité budgétaire
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contrôle, à l'approbation, à la réduction ou au rejet, sans le pouvoir
de proposer des augmentations de dépenses, et même sans le pouvoir
de bouleverser le plan gouvernemental sous prétexte de réduction des
dépenses »108
. Or, quoique la LOLF ait incontestablement renforcé les
prérogatives budgétaires du Parlement, celles-ci demeurent, dans le cadre
d'un parlementarisme encore aujourd'hui rationalisé, essentiellement
limitées au vote et au contrôle quand la préparation et l'exécution du
PLF ressortissent de la compétence du seul Gouvernement.
Encore cette règle dite des « quatre temps partagés » (ou « alternés »)
héritée du droit britannique et appliquée sous la Restauration par le
baron Louis se trouve-t-elle elle-même altérée par la rationalisation
du parlementarisme de la Ve
République qui, tout au long du cycle
budgétaire, dépossède assez substantiellement le Parlement de son
pouvoir financier109
. Si une lecture combinée de la Constitution
(spécialement ses articles 39, 42, 47, 48 et 49) et de la LOLF fait
clairement apparaître la mainmise de l'exécutif sur chacune des étapes
de la procédure budgétaire, cette omniprésence du Gouvernement
découle, à bien y regarder, de la lecture du seul article 20 de la
Constitution. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si, dans sa décision
précitée de 2012 portant sur la loi organique relative à la programmation
et à la gouvernance des finances publiques (LOPGFP), le Conseil
constitutionnel prit soin d'insister - pas moins de quatre occurrences -
sur « la liberté d'appréciation et d'adaptation que le Gouvernement
tient de l'article 20 de la Constitution dans la détermination et la
conduite de la politique de la Nation »110
.
Dans cette configuration des pouvoirs, le Conseil constitutionnel est
forcé de jouer les équilibristes, « cherch[ant] à défendre les droits du
Parlement, tout en reconnaissant que le Gouvernement est le maître des
opérations en matière de finances publiques [...] ce qui sous-entend de
ne pas ajouter des contraintes juridiques aux contraintes financières et
budgétaires »111
. De fait, ce n'est pas la sincérité du PLF qui est requise
. Le hiatus entre la présentation habituellement faite du
principe de sincérité budgétaire et sa réception par le juge constitutionnel
tient, au fond, à un malentendu que s'évertue à dissiper le professeur Robert
Hertzog lorsqu'il rappelle que l'exigence de sincérité est une « œuvre
collective »112
108. G. JÈZE, « Aspect politique des problèmes financiers », RSLF, vol. 26, 1928, p. 42.
109. Voir A. GUIGUE, « Du besoin à l'obligation de sincérité », RFFP, op. cit., p. 33-35.
110. CC, n° 2012-658 DC préc., cons. 12, 30, 32 et 63.
111. É. DOUAT et X. BADIN, Finances publiques, op. cit., p. 246.
112. R. HERTZOG, « La sincérité des documents budgétaires : principe nécessaire, multiforme
et inachevé », RFFP, n° 111, 2010, p. 141.
RFFP n° 169 - Février 2025
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