Droit & Pratique professionnelle - Pratique de la défense en perquisition chez le justiciable et l'avocat - 1re - 116

1
susceptibles de trouver, par ce biais, le moyen d'éliminer
un bâtonnier ou un délégué trop contestataire.
Le bâtonnier, qui n'a de leçon à recevoir de quiconque
- même s'il doit aux magistrats « de justes égards »12
- doit faire preuve de la plus grande fermeté et de la
plus grande prudence à l'égard de celui qui s'institue
« donneur d'ordres » car il pourrait, de la manière la plus
injuste et irrégulière qui soit, être éventuellement exposé
à l'application des dispositions de l'article 434-7-2 du
Code pénal réprimant la violation du secret de l'enquête
et de l'instruction.
Article 434-7-2 du Code de procédure pénale
Version en vigueur depuis le 24 décembre 2021
Modifié par la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021
- art. 4
« Sans préjudice des droits de la défense reconnus à la personne
suspectée ou poursuivie ou des droits des victimes,
le fait pour toute personne qui, en raison de ses fonctions,
a connaissance, en application du Code de procédure
pénale, d'informations issues d'une enquête ou d'une instruction
en cours concernant un crime ou un délit de révéler
sciemment ces informations à des tiers est puni de trois ans
d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende.
Sans préjudice des droits de la défense reconnus à la
personne suspectée ou poursuivie ou des droits des victimes,
lorsque la révélation par une personne mentionnée
au premier alinéa est faite à des personnes qu'elle sait
susceptibles d'être impliquées comme auteurs, coauteurs,
complices ou receleurs dans la commission de ces infractions,
et que cette révélation est réalisée dans le dessein
d'entraver le déroulement des investigations ou la manifestation
de la vérité, les peines sont portées à cinq ans
d'emprisonnement et à 75 000 euros d'amende.
Dans le cas prévu au deuxième alinéa du présent article,
lorsque l'enquête ou l'instruction concerne un crime ou un
délit puni de dix ans d'emprisonnement relevant de l'article
706-73 du Code de procédure pénale, les peines sont
portées à sept ans d'emprisonnement et à 100 000 euros
d'amende ».
144. L'exercice des droits de la défense constitue
un fait justificatif de la violation du secret professionnel.
- D'une manière générale, il est de doctrine et
de jurisprudence constantes que les causes objectives
12. J. leMaire, op. cit., n° 365.
116
d'impunité usuellement qualifiées de « faits justificatifs »
opèrent in rem, c'est-à-dire que leur propriété fondamentale
consiste à « retirer à l'acte accompli le caractère
délictueux qu'il pouvait, a priori, présenter »13
. En
d'autres termes, l'acte délictueux principal cesse d'être
contraire au droit en raison du fait que les éléments
constitutifs de l'infraction ne sont plus réunis, si bien
que l'infraction principale perd son existence, entraînant
l'impossibilité d'en tirer la moindre conséquence tant
sur le plan pénal que sur le plan civil. Le fait justificatif
est matérialisé par le seul « exercice des droits de la
défense », voire par un exercice « strictement nécessaire
des droits de la défense », les deux notions étant
confondues, l'exercice des droits de la défense étant
par définition toujours justifié par une stricte nécessité,
l'adjonction de l'adverbe « strictement » étant
superfétatoire.
En matière de secret médical, c'est en ce sens que la
jurisprudence de la Cour de cassation est rendue, visant
tantôt « la production en justice de documents couverts
par le secret médical » ne pouvant être justifiée que
lorsqu'elle est « indispensable à l'exercice des droits de
la défense et proportionnée au but poursuivi » (Cass.
soc., 20 déc. 2023, n° 21-20.904 P), tantôt le caractère
« strictement nécessaire à l'exercice des droits de
la défense » (Cass. soc., 5 juill. 2011, n° 09-42.959 ;
Cass. crim., 28 oct. 2008, n° 08-81.432 P), tantôt « une
mesure nécessaire et proportionnée à la défense de
l'ordre et à la protection des droits de la partie civile »
(Cass. crim., 24 avr. 2007, n° 06-88.051 P). En ce
sens, pour la doctrine, « si le médecin est relevé de
son secret pour se défendre, c'est à condition toutefois
que la révélation faite soit strictement nécessaire à sa
défense »14
.
Il appartiendra ultérieurement à l'avocat, déjà mis en
examen et perquisitionné à son insu, de déposer une
requête en nullité en mettant en exergue la volonté du
magistrat instructeur de tenir en échec l'exercice des
droits de la défense.
13. Lexis 360 Intelligence, Jurisclasseur pénal code, « Art. 122-4 », fasc. 20.
14. L. daVenas, avocat général à la chambre criminelle, « Le secret médical
et la preuve judiciaire », Recueil Dalloz 2009, p. 2642.
Droit & Pratique professionnelle - Pratique de la défense en perquisition chez le justiciable et l'avocat - 1re

Table des matières de la publication Droit & Pratique professionnelle - Pratique de la défense en perquisition chez le justiciable et l'avocat - 1re
