ESCP Europe Alumni Magazine - n°151 - Novembre/Décembre 2013 - 55

VoYaGes

la frontière kirghize. Changement de décor : finies
les plaines, voici la haute montagne, l'élevage et
les yourtes nomades. Comme nous avons aimé
ces territoires vierges et enneigés, ces somptueux
lacs de montagne, ces balades à cheval et l'accueil
chez l'habitant, seule possibilité d'hébergement au
Kirghizstan ! Ce pays est hélas pour nous la fin
du rêve terrestre. Impossibilité d'obtenir les visas
Chinois et Pakistanais, premières chutes de neige
barrant les cols et récits alarmistes sur la sécurité
au Pakistan nous imposent la mort dans l'âme de
sauter les montagnes himalayennes par avion.
Une étape imprévue
Nous rallions donc le Népal pour une étape imprévue mais où nous passons finalement trois
semaines, sous la double influence d'un délai
anormalement long pour obtenir les visas Indiens
et d'un véritable coup de cœur pour la vallée de
Kathmandou et des villages comme Bandipur ou
Bardia. Mi-décembre 2012, nous franchissons une
nouvelle fois à pied et avec une indicible émotion
la frontière indienne, dans l'état de l'Uttarakhand,
région himalayenne coincée entre le Népal et
le Cachemire. L'Inde se présente d'entrée telle
qu'elle est : bruyante, chaotique, follement attachante, unique.
Nous avions déjà eu la chance d'y venir en famille
en 2011 et découvrons que nous nous sommes
accoutumés : nos enfants supportent stoïquement
les heures passées dans les bus bondés, les cacahuètes ou fruits faisant office de repas. Plus grand
chose ne les surprend et leur naturel aura été d'un
grand réconfort dans les rares moments moins faciles. Nous affrontons le froid dans le Nord du pays
avant de redescendre vers Delhi et le Rajasthan où
nous passons les fêtes de Noël avec nos familles
venues nous rendre visite.
Nous impliquer dans un projet local

sans surprise Varanasi qui nous a le plus bouleversés. Miracle du voyage, alors que nous abordons
la ville sacrée de l'Hindouisme avec appréhension,
nos enfants nous surprennent par leur volonté
affichée d'assister aux crémations. Assister à un
tel spectacle sans effroi, remarquer à peine les
Sadhus nus dans la rue, éviter avec adresse les
innombrables bouses de vaches sur la chaussée,
esquiver les rickshaws et autres dangers de la circulation, est la preuve éloquente que le voyage fait
son œuvre et que les enfants peuvent s'adapter
à tout.
Après 3 mois passés en Inde, nous décidons de
prolonger l'aventure plus loin que prévu, vers l'Est
et de passer nos dernières semaines de voyage en
Asie du Sud-Est. Parvenus à Calcutta, nous nous
heurtons cependant à l'impossibilité de poursuivre
notre route en train ou bus : la frontière birmane
terrestre est fermée. Nous « trichons » donc pour

Marché aux bestiaux de
Toktogul (Kirghizstan).

Séance studieuse,
Jodhpur, Inde.

Après cinq mois d'itinérance, nous souhaitons désormais nous « poser » et nous impliquer dans un
projet local. Surendra et sa famille nous accueillent
à Mandore, dans les environs de Jodhpur, et nous
proposent de travailler durant un mois dans l'école
publique du village de Ralawas, à une quinzaine
de km de là. Nous y passons des semaines merveilleuses, faisant de notre mieux pour enseigner
l'anglais à des enfants comme tous les enfants du
monde : curieux, doués... et turbulents. Il fallait voir
nos propres enfants assis dans la classe parmi eux,
pris de fous rires malgré la barrière de la langue,
pour mesurer à quel point nous formons tous un
seul et même peuple. Nous quittons cette école et
ces enfants les larmes aux yeux et évoquons bien
souvent leur souvenir en famille.
Nous reprenons nos sacs : Jaisalmer, Nagaur,
Delhi, Orcha où nous logeons chez l'habitant dans
un village intouchable, Varanasi (anciennement
Bénarès) et Calcutta. De toutes ces étapes, c'est

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