ESCP Europe Alumni Magazine - n°157 - Novembre/Décembre 2014 - 27

FOCUS

Par Marc LAUNAY (MS Management des Hommes
et des Organisations 88)

Évolution des
risques

Marc LAUNAY, Responsable Dialogue Social et Environnement de
Travail pour le Groupe RENAULT, explique un nouveau risque lié
aux conditions de travail : le risque psycho social (RPS).
La reconnaissance du risque psycho social est
apparue récemment à la faveur notamment des
études sur le stress au travail, et en particulier
dans la pathologie des suicides. Les partenaires
sociaux et les organismes de sécurité sociale ont
joué une part active dans cette reconnaissance
des maladies et accidents liés au travail.

nels ou avec sa hiérarchie, étaient probablement
tout aussi nombreux dans l'entreprise industrielle
des mines de charbon au début du 19ème siècle
que dans les entreprises modernes des tours
de la Défense. D'autre part, le mode de relations
sociales en France, et la jurisprudence en particulier, tendent à renforcer la responsabilité de
l'employeur au détriment de celle du salarié.

Le Risque Psycho Social
Renforcer le dialogue social
Le RPS s'oppose au risque « physique » qui était
l'unique risque pris en considération jusqu'en
dans les années 1970. Il n'est pas sans relation
avec la tertiarisation des emplois au détriment des
emplois industriels. Il tend à faire reconnaitre la
dimension psychique et sociale à l'œuvre dans
les relations du travail comme source éventuelle
de dysfonctionnement pouvant entraîner des
accidents ou maladies. Il donne à l'employeur une
responsabilité nouvelle dans la prévention et la
disparition de ce risque.
Cette conception du RPS repose sur une
approche scientifique, louable, de rapprocher
deux disciplines séparées, voir opposées, la psychologie et la sociologie. Elle met en évidence le
lien ou l'imbrication d'une dimension purement
individuelle et d'une dimension essentiellement
collective ou sociale des dysfonctionnements
humains.
Peut-on parler d'une augmentation du RPS
dans les entreprises ?
Il est erroné de parler d'une augmentation du
RPS si l'on considère que la prise en compte du
risque, et donc l'attention qu'on lui prête, tant au
niveau individuel que collectif (notamment dans
les statistiques et le droit français) est contemporaine. Ce qui est en augmentation, c'est l'augmentation de l'observation du phénomène et non
le fait lui-même. Le stress, les conflits interperson-

La prise en compte du RPS a un effet salutaire
dès lors qu'on s'attache à prendre en considération la responsabilité partagée des acteurs
dans la survenue du risque. Montrer en quoi la
relation managériale peut être source à la fois
de satisfaction mais également de difficultés
relationnelles inhérentes à cette relation, est un
levier pour accroître la performance de l'entreprise. Ainsi de nombreuses études ont démontré
que l'affirmation de relations cordiales avec ses
collègues, ou encore le sentiment élevé que son
travail avait un sens fort (le sentiment d'avoir une
mission et une autonomie sur le contenu de son
travail) étaient des facteurs positifs de progrès
dans les résultats de l'entreprise. Toutefois, la
reconnaissance de la dimension « affective » des
relations de travail ne doit pas nous égarer en
considérant la responsabilité de cette dimension
comme relevant essentiellement de la responsabilité de l'employeur.
De ce point de vue, de nombreuses entreprises
comme Sncf ou Renault ont adopté, avec leurs
partenaires sociaux, des politiques audacieuses
visant à renforcer le dialogue social pour permettre une meilleure Qualité de vie au Travail.
Ainsi s'ouvre aux entreprises françaises, dès lors
qu'on ne les détourne pas de leur finalité, une
nouvelle ère où la dimension sociale est à nouveau facteur de performance économique.
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