Centraliens - La revue des Arts et Manufactures - Juillet 2013 / N°627 - 31

ÉNERGIES MARINES

Figures 2 : Flotteurs de type TLP, Spar (Hywind) et Semisubmersible (Wind

Où en est-on sur l’éolien
flottant ?

Si des solutions existent avec le retour d’expérience de l’offshore pétrolier, des adaptations
importantes sont nécessaires pour, d’une part,
optimiser les coûts des composants (flotteur et
ancrage) et, d’autre part, réduire l’effet des mouvements sur le fonctionnement de l’éolienne.
Plusieurs projets de démonstrateur d’éolienne
flottante se sont développés ces dernières années
pour bénéficier d’un retour d’expérience à la mer
sur des éoliennes de faible puissance (1 MW à
2 MW) comparativement à l’éolien fondé.
A l’étranger, deux projets sont déjà installés
en mer (Figure 2).
Le Projet Hywind (porté par la compagnie
pétrolière Statoil, avec l’implication de Technip) composé d’un flotteur de type « spar »
ancré dans 220 m d’eau, au large de la Norvège, et supportant une turbine de 2,3 MW.
L’éolienne est en place depuis 2009.
Le projet Windfloat (porté par Principle
Power et la compagnie portugaise EDP) composé d’un flotteur semi-submersible ancré
dans 50 m d’eau, au large du Portugal, et
supportant une turbine de 2 MW. L’éolienne
est raccordée depuis fin 2011. Une originalité
de Windfloat est le déport du mât d’éolienne
sur une des colonnes, nécessitant un système
de ballastage pour compenser l’inclinaison
du flotteur.
Côté français, deux projets bénéficient du
support des Investissements d’Avenir via
l’ADEME. Le premier, Winflo, est un démonstrateur d’éolienne d’une puissance de
1 MW dont la plateforme est de type semisubmersible (Figure 1). Le projet est mené en
partenariat par Nass&Wind DCNS, le groupe
Vergnet, l’Ifremer et l’ENSTA Bretagne. Un
démonstrateur doit être installé au large du
Croisic sur le site d’essais SEM-REV, opéré
par l’Ecole Centrale de Nantes, et raccordé au
réseau électrique en 2014. Une ferme pilote de
plusieurs éoliennes flottantes multi-mégawatts
est ensuite envisagée au large de Groix.
Le deuxième projet, VertiWind, porté par les
sociétés Nenuphar et Technip, innove de par
l’utilisation d’un turbine à axe verticale. L’intérêt est de centrer les masses dans la partie
basse du système et donc de réduire le volume
du flotteur (effort d’inclinaison réduit). Un
autre avantage est la limitation des interféwww.centraliens.net

rences aérodynamiques entre éoliennes comparativement aux éoliennes à axe horizontal.
La turbine VertiWind suit une phase de test à
terre avant d’être embarqué sur un flotteur
adapté - Figure 4.
Un prototype devrait être installé en 2014 au
large de Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône),
avant de l’étendre en 2016 à une ferme de
13 éoliennes (26 MW), nommée VertiMED.
EDF Energies Nouvelles a rejoint le projet,
qui bénéficie de subventions européennes
pour la mise en place du site d’essais en mer
puis de la ferme pilote (NER300).
A coté de ces deux projets, il faut noter l’initiative d’IDEOL, start-up situé à La Ciotat
(Bouches-du-Rhône), qui développe un
concept innovant d’éolienne flottante «auto-stabilisée», avec un flotteur muni d’un
« moon-pool » destiné à limiter les mouvements. Une maquette à l’échelle 1/60ème a
d’ores et déjà été testée en bassin d’essais à
la Seyne-sur-Mer (Var). Il est prévu qu’une
turbine de 2 MW soit installée sur un site
d’essais existant dès fin 2014 et qu’une turbine de 6 MW le soit au large de l’Angleterre,
en 2015 - Figure 5.

Accompagnement R&D
des projets ?

Comme tous les projets EMR, la conception et l’optimisation des éoliennes flottantes
nécessitent des moyens et des outils de validation. Ils doivent permettent non seulement
de confirmer les performances (production
et coûts) mais également la fiabilité de tous les
composants sur la durée de vie envisagée (environ 20 à 25 ans). La vérification de la tenue
de l’éolienne aux conditions d’environnement
extrême rencontrées sur le site conditionne
la crédibilité du projet (certification et assurance). - Figure 6.
L’accompagnement des développeurs se fait
à trois niveaux, correspondant plus ou moins
aux différentes étapes de développement d’un
projet (de la pré-conception aux tests en mer) :
❚Les logiciels de simulation
❚ es moyens d’essais à échelle réduite (bassins
L
de génie océanique)
❚Les sites d’essais en mer.

L’avenir de l’éolien flottant ?

équivalente à celles de l’éolien fondé (5 MW à
8 MW voire plus). L’enjeu économique associé
est d’atteindre également un coût équivalent
soit de 150 et 200 euros le MWh dans un premier temps.
L’objectif est d’autant plus ambitieux que les
parcs seront éloignés de la côte, le raccordement électrique intervenant significativement
dans l’investissement. Il y a probablement une
limitation en distance vis-à-vis des pertes dans
le transfert d’énergie.
Cependant l’éolien flottant ne doit pas être vu
comme une alternative à l’éolien posé mais
comme un complément. Associer éolien flottant et éolien posé sur une même zone en
mutualisant les équipements de raccordement
et les opérations de maintenance sera certainement bénéfique.
Plusieurs projets voient également la mutualisation sous un angle en association différentes
technologies de production d’énergie d’origines différentes sur un même site, voire sur un
même support flottant. C’est l’objectif que s’est
fixé le projet Européen en cours MARINA. Un
exemple concret, avec déjà un démonstrateur
en mer, est le projet Poséidon, développé par
la société Danoise Floating Power Plant, qui
associe éolien et énergie des vagues.
Cette approche pourrait permettre d’envisager l’exploitation des énergies marines avec
une stratégie locale : recenser les ressources
accessibles sur un site donné (vent, houle,
courant) et concevoir des systèmes de production mixtes adaptés au site à partir des
briques technologiques éprouvées individuellement.
n
Christian Berhault

Christian Berhault
Docteur de l’Ecole Centrale
de Nantes, appartient au
laboratoire LHEEA (CNRS
UMR6598) de l’Ecole
Centrale de Nantes et est,
depuis 2012, directeur du site d’essais en mer
SEM-REV pour les EMR. Il a été auparavant
directeur technique de la société Principia
et est expert en conception des structures
marines.

D’un point de vue technique, il s’agit désormais de passer aux turbines de puissance

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