Centraliens - La revue des Arts et Manufactures - Juillet 2013 / N°627 - 33

ÉNERGIES MARINES

déferlent. Certains bassins peuvent être en
eau de mer, d’autres peuvent être aussi dotés
de dispositifs générant du vent au-dessus de la
surface libre ou du courant mobilisant toute
ou partie de la colonne d’eau. On peut citer
pour l’exemple le bassin de génie océanique de
l’Ecole Centrale de Nantes qui est le plus grand
en France. Long de 50 m, large de 30 m avec
une profondeur constante de 5 m, ce bassin en
eau douce est doté de 48 volets qui permettent
de générer des houles multidirectionnelles de
plus de 1 mètre crête à creux - Figure 4.
Le choix de l’échelle de réduction est une première étape cruciale dans la préparation des
essais car elle doit être compatible avec les dimensions et les capacités techniques du bassin
et les caractéristiques mécaniques du modèle
réduit mais être représentative au mieux de la
physique à l’échelle du réel.
Le principe le plus souvent appliqué est de
respecter le rapport des forces extérieures
appliquées au système étudié sur les forces de
gravité : la valeur de ce ratio doit rester identique quelle que soit l’échelle considérée. Cette
démarche correspond à un respect de la similitude de Froude : les dimensions sont alors
réduites d’un facteur géométrique . Toutefois cette similitude implique également que le
temps et la vitesse de la maquette sont dans un
rapport de racine carrée de , les forces dans
un rapport de au cube par rapport au prototype. Exemple : une machine réelle (appelée couramment prototype) qui est étudiée à
l’échelle du 25ème voit ses dimensions divisées
par 25, sa vitesse par 5 et ses forces divisées par
253=15 625.
Mais que ce soit pour le prototype ou pour
la maquette, les caractéristiques de l’eau sont
quasiment identiques : il en résulte une distorsion d’une autre similitude, dite de Reynolds,
qui caractérise les effets de la viscosité de l’eau
sur les écoulements autour du système étudié. Le nombre de Reynolds ne pouvant être
respecté à la fois avec le prototype et la maquette, il s’agit alors de s’assurer que le régime
des écoulements reste voisin ce qui revient à
s’assurer, voire imposer, que les écoulements
restent turbulents localement, à proximité de
la maquette.
Le choix de l’échelle de réduction doit également tenir compte des contraintes apportées
par le bassin d’essais lui-même : les caractéristiques des houles générées, la taille et les

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coûts de fabrication de la maquette, etc. Dans
le cas d’un système EMR, il est usuel de dissocier son comportement en situation opérationnelle normale, c’est à dire en situation
de production pour des conditions environnementales usuelles, de son comportement
en situations extrêmes proches de son état
limite ultime (essais dits de survivabilité). Il
est ainsi parfois nécessaire de réaliser deux
maquettes d’échelles différentes pour étudier
les deux configurations. Les dimensions de la
configuration « production » sont choisies les
plus grandes possibles pour limiter les effets
d’échelle et les effets de confinement. Ces derniers peuvent fausser les extrapolations des
données maquette aux données prototype si
les phénomènes physiques ne sont pas correctement modélisés, par exemple mer ouverte
et milieu «  infini  » pour le prototype, parois
et milieu « fini » pour la maquette. La modélisation de la bathymétrie (variation des profondeurs d’eau) est en particulier une difficulté
majeure.
Les essais en bassin d’une maquette EMR permettent d’accéder à la mesure de nombreux
paramètres dans des conditions maîtrisées,
par exemple les caractéristiques de la houle et
du courant, les efforts globaux et internes au
système, les mouvements de la maquette, les
efforts d’ancrage, les performances de production suivant la technologie testée.
La diversité des machines à tester implique
la mise en place des méthodologies adoptées,
approuvées et suivies par les différents acteurs
(concepteurs, chercheurs, expérimentateurs).
Des protocoles sont bien en place dans l’industrie navale et offshore depuis de nombreuses
années mais nécessitent des adaptations pour
les EMRs, non encore abouties. De plus des
équipements supplémentaires ont dû être
développés, comme la génération du vent Figure 5.
Les essais en bassin sont utilisés pour l’étude
de toutes les phases de vie du système, de l’installation au démantèlement, en passant par les
cas d’avaries possibles ou de survie.
Un apport très important des essais en bassin
reste la validation des modèles numériques,
sachant qu’il n’est pas réaliste d’optimiser un
système uniquement à partir d’essais, pour des
raisons de délais et de coûts.
n
Pierre-Emmanuel Guillerm,
Jean-Marc Rousset (ECN)

Figure 4 - Bassin de génie océanique de l’Ecole Centrale de Nantes

Figure 5 - Essais d’une éolienne flottante soumise à la houle
et au vent

Pierre-Emmanuel
Guillerm
Ingénieur (ECN 1996) et
docteur (2001) de l’Ecole
Centrale de Nantes, appartient au laboratoire LHEEA
(CNRS UMR6598) de l’Ecole Centrale De
Nantes et est responsable depuis 2009 de
l’équipe Dynamique des structures et des
systèmes marins. Il a été auparavant responsable de l’équipe résistance et propulsion du
Bassin d’Essais des Carènes du Val de Reuil
de la DGA/TH.

Jean-Marc Rousset
Docteur en Mécanique des
Milieux Fluides de l’Université de Caen - Basse
Normandie, est Ingénieur
de Recherche au LHEEA,
en charge des projets et des installations
expérimentales en hydrodynamique.

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