L’école aujourd’hui - n°9 - Mai 2010 - 19

le premier indicateur se situe au niveau du regard de l’enseignant sur l’élève. l’enseignant doit avoir un regard positif sur l’élève, s’appuyer sur ce qu’il sait et ce qu’il est, plutôt que de détecter de manière oppressante et anxiogène, ses lacunes, ses carences, ses erreurs. il doit considérer cet élève comme un être intelligent, comme un feu qu’on allume plutôt que comme un vase qu’on remplit. Ne pas prendre en compte les savoirs des élèves (ils savent de plus en plus de choses hors des programmes scolaires) et leurs représentations même les plus naïves est une cause d’échec scolaire. la pédagogie des situations, celle de la résolution de problèmes, celle de l’analyse des démarches des élèves sont des signes positifs ! le deuxième indicateur se situe au niveau de l’éducation du regard de l’élève sur l’autre. l’enfant est une personne et un être social. il a besoin de l’autre pour grandir. il est dangereux de cultiver l’idée de compétition, de loi du plus fort, de mépris pour celui qui est en difficul-

té. le travail de groupes, les productions collectives, les ateliers avec des moments de travail en autonomie, sont des signes positifs ! le troisième indicateur se situe au niveau du regard de l’enseignant sur les parents de ses élèves. l’enseignant doit respecter tous les parents, les regarder comme des hommes et des femmes porteurs eux-mêmes de savoirs, des citoyens responsables et non comme des “parentsdélèves” que l’on convoque quand un enfant pose un problème, souvent dans un rapport de domination de celui qui sait et qui conseille à celui qui ne sait pas ou qui ne fait pas, ou des répétiteurs faiseurs de devoirs. l’ouverture de l’école aux parents pour des échanges de savoirs, l’aide aux réunions d’information sur les apprentissages sont des signes positifs ! le quatrième indicateur se situe au niveau du regard sur la place de l’école dans la société. l’école ne résoudra pas seule les problèmes qui l’assaillent. l’ouverture et la coopération avec les associations, avec les

Dans toutes les écoles, il y a des enseignants qui cherchent, qui innovent, qui mobilisent les enfants, qui ouvrent leur classe, qui expliquent et dialoguent.

mouvements d’éducation populaire, avec les clubs, dans le cadre – quand c’est possible –, de projets éducatifs locaux sont des signes positifs !

Alors, une école autrement…

Quand ces regards se dévoilent, se croisent, se complètent, la confiance s’établit. on peut alors faire le pari d’une plus grande efficacité de l’école. le plaisir d’apprendre à savoir, d’apprendre à faire, d’apprendre à être et d’apprendre à vivre ensemble, les quatre piliers de l’éducation pour jacques delors – dans un rapport célèbre à l’uNeSco –, peut alors s’épanouir et laisser l’image du bonheur s’imposer, “avec des craies de toutes les couleurs, sur le tableau noir du malheur” du remarquablement intelligent cancre de jacques Prévert. Pierre Frackowiak1 Inspecteur honoraire de l’Éducation nationale
1. coauteur, avec Philippe Meirieu, de L ’Éducation peut-elle être encore au cœur d’un projet de société ? (éditions de l’aube, 2009), auteur de Pour une école du futur. Du neuf et du courage (cf. Bloc-notes, p. 22-23).
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