ParaMag - n°300 - Mai 2012 - 67

les dérives permises par l’anonymat, que l’on trouve jusqu’à l’overdose dans un nombre vertigineux des textes de toutes origines qui circulent et se croisent sur la Toile : tout cela est navrant, mais d’une banalité telle qu’il vaut sans doute mieux (même si quelque part cela fait mal aux yeux) ne pas s’y attarder… Les vrais problèmes sont ailleurs. Entre autres celui-ci, qui me tient à cœur, car il a, pendant toutes les années où la rubrique «De mon temps…» occupait une bonne partie de mes soirées, été au centre de mes préoccupations : Que restera-t-il de toutes ces informations dans quelques mois, dans quelques années, dans quelques décennies, alors que déjà au bout de quelques jours, tout le monde est passé à autre chose, et qu’il ne reste, au mieux, dans les recoins des sites, que des fichiers et dossiers vite abandonnés, que personne ne se donnera plus la peine d’aller visiter ? Cette situation se rencontrait déjà, bien entendu, du temps de la presse exclusivement écrite, mais avec une intensité bien moindre, et surtout se produisait beaucoup moins vite : j’ai toujours été frappé de voir, à la lecture des courriers reçus à la suite de mes articles, ainsi que des innombrables réactions récoltées au fil des rencontres sur les terrains, notamment aux boogies de Vichy, que beaucoup de personnes (de la part desquelles, souvent, je ne m’y attendais d’ailleurs pas) conservaient précieusement, et consultaient attentivement, des quantités de documents, vieilles revues, livres, coupures de journaux, etc., sur lesquels elles s’appuyaient, soit pour compléter ce que j’avais écrit, soit pour le contester… Je suis bien placé pour savoir que malgré cela, tous ces documents disparaissent finalement très vite : il m’aura fallu près de trente ans de recherches, et une patience infinie, en même temps qu’un flair de Sioux, pour trouver et accumuler les quelque 2 m3 de revues anciennes, livres épuisés, publications disparues, journaux éphémères et autres irremplaçables paperasses antiques qui meublent aujourd’hui mon grenier (il est vrai toutefois que l’usage du net faciliterait sans doute considérablement ces opérations aujourd’hui – mais à quel prix !). Et encore me manque-t-il des tas de choses que j’aimerais bien retrouver… J’ai bien peur que notre civilisation, qui est paraît-il celle de la communication, ne permette plus aussi bien à

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RÉTRO

Publicité publiée dans Para Presse en août 1963.

l’avenir cette préservation de ce qu’il faut bien considérer comme un patrimoine, tout simplement parce que les supports censés le contenir ne seront plus accessibles : on voit bien déjà la difficulté qu’il y a à visionner aujourd’hui les films Super 8 de ma jeunesse, de même que les photos sur diapositives ; qu’en sera-til a fortiori de tout ce qui est virtuel ! Par ailleurs, l’histoire d’une activité humaine, et en particulier celle d’un sport comme le nôtre, ne peut pas se réduire à une compilation d’événements isolés et coupés du contexte social ou historique dans lequel ils se sont produits : pour bien comprendre une époque, il faut disposer de toute la multitude de composantes qui font son ambiance, sa couleur, sa saveur, sa vie… Si vous en avez la curiosité - et la possibilité matérielle - , replongez-vous dans la lecture d’un vieux magazine parachutiste, genre Para-Presse des années soixante, ou même ParaMag des années 80 (voir bonus numérique) : parmi les résultats de compétitions dont seuls les vainqueurs se souviennent encore, et les exploits de «célébrités» éphémères depuis longtemps oubliées de tous, vous y trouverez les pubs attendrissantes, les produits obsolètes, les voitures disparues, les films qu’on ne revoit plus que sur les chaînes rétro

du câble, les chanteurs à la retraite, en résumé toute la vraie vie d’une époque révolue (et qui n’était, quoi qu’en prétendent les vieux nostalgiques, pas meilleure que celle que nous vivons…) ! Allez, pour terminer sur ce thème, je ne résiste pas au plaisir de vous en fournir, chers lecteurs et copains, un échantillon, glané dans Para-Presse du mois d’août 1963 : pour ne rien vous cacher, c’est avec ce matériel-là que j’ai débuté, et les Paraboot, je les ai encore, mais je ne saute plus avec ! Je ne saurais donner à cet article une meilleure conclusion que les quelques lignes qui terminaient déjà celui rédigé lors de la sortie de ParaMag n° 200 : elles sont plus que jamais d’actualité, et je me contenterai donc d’y réactualiser les numéros concernés :

«Puisse ce numéro 300, que ParaMag est très fier d’avoir été le premier à atteindre, être suivi de nombreuses centaines d’autres, et notre revue échapper enfin à la malédiction dont hélas ont été frappés tous ses prédécesseurs : Rendez-vous, si les Dieux et surtout nos lecteurs - nous aident, au numéro 400 ! »
René Roy (avril 2012) n

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