TREMPLIN - #04 - LE MAGAZINE DE L’INGÉNIEUR ISAE-Supméca - 27

Q. Quel est votre rôle dans une enquête ?
R. En tant qu'enquêteur spécialisé, je réalise principalement des
examens sur des pièces ou des équipements. J'ai aussi participé à
des groupes de recherche en tant qu'enquêteur mais davantage
en mode « chef de projet ». Lorsqu'il faut piloter des activités
réalisées à l'extérieur par exemple. J'ai également mené le sousgroupe
« recherches » sur l'enquête du A380, chargé de retrouver
les pièces manquantes au Groenland. Les tâches sont donc
variées ! L'objectif est qu'on soit impliqué dans toutes les phases
de l'enquête, de la récolte du factuel jusqu'au rapport final.
Pour être opérationnel dans tous ces rôles nous avons accès à des
formations poussées et régulières sur toutes les familles d'aéronefs
ou sur des sujets plus spécifiques. Ce sont souvent les constructeurs
eux-mêmes qui les dispensent. Nous avons aussi des formations
en gestion de projet. Nous dispensons même des formations à
nos nouvelles enquêtrices et nouveaux enquêteurs ou à d'autres
étrangers sur la conduite d'enquêtes majeures : la méthodologie
d'une enquête, les opérations, le facteur humain.
Q. Combien de temps dure une enquête ?
R. En général la partie « récolte des données factuelles » dure
quinze jours à un mois. Puis arrivent les examens et les activités
de recherches spécifiques qui peuvent durer jusqu'à six mois en
moyenne. Vient enfin l'analyse et la rédaction du rapport qu'on
essaie de conclure un an après l'accident. Il faut en particulier
compter la relecture du rapport par toutes les parties prenantes
ce qui prend un certain temps. Une enquête majeure peut durer
plusieurs années car il peut arriver qu'on ait à chercher des pièces
manquantes pendant longtemps - comme pour le Rio-Paris où
les enregistreurs ont été retrouvés deux ans après l'accident. En
moyenne une enquête sur un accident d'aviation générale dure
environ six mois à un an.
Q. Collaborez-vous avec des entités extérieures ?
R. Oui, on fait appel à des expertes et des experts en cas de besoin.
Lorsqu'on n'a pas les spécialistes en interne, par exemple pour le
comportement des matières plastiques, des élastomères ou du
bois. Il nous est même arrivé de demander l'aide d'ornithologues
du Muséum d'histoire naturelle pour des cas de choc aviaire.
Dans le cadre d'une étude, un laboratoire de recherche en
ergonomie nous a permis de faire une expérience d'eye-tracking
pour déterminer où regardaient les pilotes lors d'une simulation de
vol. Cela nous permet de mieux reconstituer ce qui se passe dans
le cockpit dans des situations particulières.
En réalité, nous travaillons aussi beaucoup avec les constructeurs.
Nous avons souvent besoin de plans, de spécifications, de dossiers
de calculs. Comme notre rapport est public, ils ont tout intérêt à
collaborer et il est évidemment dans leur intérêt de comprendre
comment et pourquoi l'accident s'est produit. Cela peut s'avérer
plus compliqué si le constructeur est étranger du fait des différences
de pratiques, de culture. Nous avons fréquemment des échanges
avec les pays européens bien sûr, les Etats-Unis, la Chine mais aussi
l'Amérique du Sud ou l'Asie du Sud-Est entre autres.
9. Regroupe l'aviation de loisir, l'aviation sportive (voltige), le travail aérien, en d'autres termes, tout ce qui n'est pas du transport commercial.
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