Guide_Agences_2020_Tome1 - 7

partent de l'idée qu'ils sont les seuls clients
et qu'à chaque fois qu'ils demandent
quelque chose à leur agence, le créatif, le
planneur stratégique ou le community
manager sont dans le bureau du commercial. Rapporté à la vie réelle de l'agence, ce
mode de fonctionnement n'est pas tenable.
Dans notre métier, malgré notre meilleure
volonté, l'excellence demande toujours du
temps, et pas seulement de l'intuition et de
la « dépatouille ». Et cela est évidemment
vrai pour les compétitions où les annonceurs donnent des délais complètement
fous pour traiter des sujets importants et
décisifs pour leur avenir.
La convergence des métiers et des outils de la
communication n'explique-t-elle pas également
la situation ?
L. H. : Le métier a profondément changé. Les livrables que doivent fournir les
agences sont plus complexes, plus divers
et plus nombreux que par le passé. Avant,
il fallait trouver une expression créative
à un positionnement stratégique de la
marque et le décliner sur un nombre de
supports limités. Aujourd'hui, la multiplication des formes et des modèles d'expression ajoutée à celle des médias et des
supports impose de mettre en jeu dix
formes d'expression et cinq ou six métiers
de la communication simultanément : de
la pub et des PR, du commercial et du corporate, de l'externe et de l'interne, du design applicatif et de l'expression publicitaire, de la création et de l'influence, etc.
Cette complexité et cette multiplicité s'observent dans les « recos » des agences qui
dépassent souvent les 200 pages, parce
qu'il faut y détailler tous les enjeux : de
stratégie, de création, de performance,
d'intégration de la data, les déclinaisons
digitales, le social media, la réappropriation en interne... Ce qui nous est demandé
est beaucoup plus complexe et difficile à
produire alors que, dans le même temps,
les compétitions ont diminué en termes
de valeur à cause de la fragmentation de
la demande des clients.
D'année en année, les annonceu rs
exercent une pression importante sur
leurs agences pour que ce qu'ils payaient
100 il y a moins d'un an ne coûte que 95 ou
90 l'année suivante, sans que la quantité

2020

de travail diminue. Et les services achats des annonceurs jouent un rôle de plus en plus important, à la fois
en amont et en phase finale des compétitions et lors de
la renégociation des contrats, animés d'un mot d'ordre
souvent univoque de « cost-killing », et sont porteurs de
« requests for information » très lourdes pour les agences.
Ces dernières ont par conséquent besoin de partager
avec les directions de la communication, du marketing,
mais aussi des achats le fait qu'on nous demande de produire des choses plus complexes dans des délais plus
courts, avec moins d'argent et dans un contexte moins
prévisible et moins lisible.

LAURENT HABIB a annoncé
lors de sa réélection à la
présidence de l'AACC, en juin
2019, vouloir ouvrir un cycle de
réflexion sur la rémunération
des agences et les nouveaux
modèles de compétition.

Est-ce que vous pensez que les communicants n'ont pas le même
logiciel de chaque côté ?
L. H. : L'organisation des clients eux-mêmes pose des questions. La dircom n'est pas toujours représentée dans les
comex. Elle est parfois contestée ou concurrencée par
d'autres directions (DRH, marketing, digital, relation

STRATÉGIES - GUIDE AGENCES TOME 1

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