i+D - Septembre/Octobre 2018 - 36

Le design de ce que l'on ne voit pas - par Brian J. Barth

Le BioBE ne fait pas qu'établir les fondements scientifiques de meilleur
design ; il les traduit en outils et techniques que les designers utiliseront.
Kevin Van Den Wymelenberg, architecte, Ph. D. et codirecteur du BioBE
(et directeur de l'Institute for Health in the Built Environment, aussi à
l'University of Oregon), décrit son travail comme « des probiotiques
architecturaux » ou « concevoir l'invisible ». Et cet « invisible » n'est pas
que les microbes, mais aussi l'acoustique, la performance thermique
et tous les aspects de notre environnement qu'on ne voit pas, comme
les photorécepteurs de la rétine envoyant des signaux au noyau de
l'hypothalamus qui joue un rôle dans les rythmes circadiens. »
M. Van Den Wymelenberg envisage un avenir où les bâtiments moduleront
leurs microbiomes au profit des occupants. Comme la stérilité totale
n'existe pas, au lieu d'éliminer les pathogènes avec des produits chimiques,
on cherche à favoriser un microbiome sain. Cette vision exigera de
mieux comprendre l'interaction entre lumière naturelle, CVC et diverses
surfaces ou de développer des capteurs de la qualité de l'air sophistiqués,
des « renifleurs complexes », car différents matériaux favorisent des
communautés de bactéries différentes, selon la température, l'humidité et
l'exposition aux rayons UV.
« Dans beaucoup d'édifices, on contrôle la prise d'air frais par un capteur
de CO2, essentiellement un indicateur de l'occupation humaine - plus il y a
de gens, plus le niveau de CO2 est élevé dans le plénum de reprise d'air, et
plus le système doit admettre d'air extérieur, dit M. Van Den Wymelenberg.
J'imagine de tels capteurs un peu partout dans les bâtiments, "reniflant"
des souches précises de bactéries, de champignons et de virus, et réglant
le débit d'air en conséquence. Ils analyseraient une gamme de variables
biotiques et abiotiques [vivantes et non vivantes] pour déterminer le régime
d'écoulement d'air optimal. » La pollution ou les particules en suspension
des feux de forêt, qui modifient la qualité de l'air, jouent aussi un rôle
important dans ce scénario, ajoute-t-il.

Des particules de peau humaine se transmettent constamment
dans l'air. Au centre BioBE, on mesure le nuage bactérien que
créent les gens dans une salle contrôlée de manière à retirer
l'influence de bactéries de toute autre source.
(Photo : BioBE Center)

Le lien corps-esprit-bâtiment
Les chercheurs du centre BioBE mesurent
les bactéries à la surface des feuilles, qui
abritent une riche communauté microbienne.
(Photo : BioBE Center)

Certains organismes, tel l'International WELL Building Institute, s'attachent
à valider les bienfaits d'un design consciencieux pour la santé des humains.
Sans parler des bienfaits sociaux potentiels, qui entraînent des économies
en soins de santé, et beaucoup d'autres, plus intangibles. Les organisations
d'avant-garde aussi reconnaissent les avantages financiers de l'intégration
du bien-être dans le milieu de travail.
Par exemple, le siège de l'American Society of Interior Designers (ASID) à
Washington, D.C. Après le déménagement, des anciens bureaux désuets
dans de nouveaux locaux (devenus en 2016 les premiers bureaux au monde
certifiés LEED Platine et WELL Platine), on a constaté une augmentation
de la satisfaction et de la productivité des employés. Ils travaillaient
19 pour cent plus que prévu par l'employeur, et le rendement s'est amélioré
de 16 pour cent, « une augmentation estimée à 694 000 $ au cours de
la première année d'occupation », selon le dossier préparé par la firme
Perkins+Will, architecte de projet. « L'on s'attend à une augmentation de
7 millions de dollars en répercussions financières au cours de l'entente
de location de 10 ans », au même taux d'amélioration.

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i+D - septembre-octobre 2018
i+D - Septembre/Octobre 2018

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